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Examen des pratiques consensuelles

Par Jamie Ricci

Sommaire

Le présent rapport vise à soutenir la conception de programmes d’accès au génie destinés aux Autochtones partout au Canada. Contrairement aux processus traditionnels pensés en fonction des besoins des étudiants issus de la culture majoritaire, les programmes d’accès destinés aux étudiants autochtones ont pour but de favoriser leur entrée dans l’enseignement supérieur.

Nous avons procédé à une analyse documentaire dans le but de déterminer les pratiques exemplaires de mise en œuvre d’un programme d’accès aux études de génie au Canada. Nous avons néanmoins constaté que peu de documents traitaient de cette question précise et qu’aucun ne décrivait de pratiques exemplaires en la matière. Nous présentons donc plutôt ici une synthèse des pratiques consensuelles ou des activités définies ou mises en œuvre dans de nombreux programmes sans avoir été évaluées à fond.

Les sept pratiques consensuelles décrites dans ces pages sont des activités que de nombreux gestionnaires de programme ont jugé importantes pour la réussite de leurs programmes. Elles devraient guider la mise en œuvre des programmes ayant pour but d’élargir l’accès des Autochtones aux études en génie. Si certains volets sont essentiels à l’exécution des programmes — ils en sous-tendent d’autres et jouent un rôle crucial dans la prestation d’un programme de qualité —, d’autres peuvent toutefois être adaptés en fonction du contexte et des ressources de l’établissement d’enseignement postsecondaire. Voici une brève description de ces sept pratiques consensuelles :

  1. Tout au long du processus, il importe de renforcer la capacité d’évaluation au sein du programme. Par l’analyse comparative, l’évaluation de la mise en œuvre et l’évaluation de l’utilité, les gestionnaires de programme peuvent déterminer ce qui fonctionne bien et soutenir ainsi d’autres programmes en plein essor. S’il est vrai que les pratiques traditionnelles d’évaluation peuvent suffire, il n’en demeure pas moins que les gestionnaires doivent travailler avec les membres des collectivités visées et recourir à des pratiques d’évaluation décolonisées.
  2. Durant l’élaboration du programme, la faculté de génie doit absolument tisser des liens avec les collectivités visées par le programme d’accès.
  3. En collaboration avec les membres de ces collectivités, les gestionnaires de programme et d’autres personnes concernées peuvent commencer à définir les caractéristiques de leur population cible.
  4. La connaissance des besoins de ce groupe permettra d’offrir des services de soutien adéquats.
  5. De nombreux établissements ont réussi à admettre des étudiants de qualité en utilisant un système d’admission non normalisée qui tient compte non seulement des notes, mais également de l’ensemble du profil de la personne.
  6. Les étudiants obtiennent également une aide financière fondée sur les besoins plutôt que sur le mérite.
  7. Les programmes de transition et les programmes d’orientation spécialisée favorisent la transition des étudiants vers des études postsecondaires ainsi que leur préparation à celles-ci.

Nous traiterons des recommandations et des limites après avoir décrit ces pratiques consensuelles. Le présent rapport vise à favoriser une discussion en vue d’obtenir une juste représentation des Autochtones en génie au Canada.

 

De l’admission à la transition de l’environnement familial à celui de l’enseignement supérieur

Ingénieurs Canada est situé sur un territoire algonquin qui n’a été ni cédé ni abandonné par cette Première Nation. 

Présentation

Les facultés de génie de l’ensemble du Canada aident leurs étudiants et leurs chercheurs à devenir des innovateurs et des entrepreneurs — qu’il s’agisse de faire la prochaine découverte technologique majeure, de développer une jeune entreprise qui bat des records ou de trouver des solutions aux problèmes les plus persistants du monde. Partout au pays, les universités investissent dans des laboratoires à la fine pointe, dans de nouvelles technologies et dans des environnements collaboratifs.

Un facteur pourtant essentiel à l’innovation en génie passe pourtant souvent inaperçu : la diversité. L’inclusion des divers peuples dans la formation en génie et dans les lieux de travail des ingénieurs favorise la capacité de résoudre des problèmes, d’être créatif, de penser de façon critique et de reconnaître la complexité cognitive (Smith et Schonfeld, 2000). La diversité est un atout majeur pour l’innovation.

Dans le milieu de l’enseignement postsecondaire, nombreux sont ceux qui proposent d’indigéniser l’éducation et de donner suite aux appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation du Canada (CVR) (Commission de vérité et réconciliation du Canada, 2015; Commission de vérité et réconciliation du Canada, 2015a). À la lumière du rapport et des recommandations de la CVR, Universités Canada — qui représente 97 universités canadiennes — prône l’élimination des disparités éducatives « afin de renforcer les collectivités autochtones, de permettre aux peuples autochtones de continuer à s’accomplir, de favoriser une citoyenneté canadienne avisée et de contribuer à la croissance économique à long terme et à l’inclusion sociale au Canada. » (Universités Canada, 2015).

En outre, selon un rapport de Sharpe et Arsenault (2010), le fait de combler l’écart entre les résultats en éducation et les besoins du marché du travail d’ici 2026 pourrait se traduire par à une hausse de 36,5 milliards de dollars du produit intérieur brut (PIB) du Canada. Cumulativement, le comblement de cet écart de 2001 à 2026 entraînerait des retombées de 400 milliards, dont environ 179 milliards découleraient directement de la hausse du niveau de scolarité (Sharpe et Arsenault, 2010).

L’impératif éthique de promouvoir l’accès des Autochtones aux études postsecondaires en génie semble clair, mais il importe également de rappeler l’importance cruciale de la diversité pour l’avancement du génie et des sciences appliquées. Pour faire du Canada un chef de file mondial en matière d’innovation, nous devons d’abord comprendre qu’investir dans l’accès des peuples autochtones au génie, c’est investir dans notre avenir collectif.

Ce rapport vise à décrire les pratiques communes des programmes d’accès existants ou les moyens par lesquels certains établissements postsecondaires augmentent les inscriptions des Autochtones. Nous avons d’abord préconisé l’analyse des documents des programmes canadiens d’accès au génie, mais nous devions également examiner d’autres documents sur ce sujet sans nous limiter à cette géographie ou à ce domaine. En outre, les documents étudiés ne comportaient pas d’évaluation solide des programmes, mais plutôt une description de leurs activités et de leurs résultats. Nous avons donc fait état des pratiques consensuelles ou des activités et des résultats généralement acceptés et souvent déployés dans le cadre de programmes d’accès. Nous avons ainsi défini sept pratiques consensuelles et décrit chacune d’entre elles en fournissant une ventilation des volets des programmes.

Au-delà de cette publication, Ingénieurs Canada espère amorcer une conversation sur l’accès des Autochtones aux programmes postsecondaires de génie.

 

Les études en génie et les autochtones

Selon le Rapport 2016 sur les inscriptions en génie et les diplômes décernés d’Ingénieurs Canada, environ 1 % des étudiants en génie de premier cycle inscrits à des programmes de génie agréés au Canada se définissent comme des Autochtones (soit comme membres des Premières Nations, des Métis et des Inuits). L’Enquête nationale auprès des ménages de 2011 indique que plus de 4,3 % de tous les Canadiens se définissent comme des Autochtones (Statistique Canada, 2015). La profession d’ingénieur se doit de refléter cette répartition démographique afin d’être apte à résoudre les problèmes complexes de notre société. Il faut combler l’écart.

Ingénieurs Canada est d’avis que la pérennité de la profession d’ingénieur exige que les membres des organismes de réglementation en génie provinciaux et territoriaux soient représentatifs de la société canadienne. Il faut augmenter le nombre d’étudiants autochtones ayant accès à l’enseignement postsecondaire en génie qui persévèrent dans leurs études afin que la profession représente la réalité démographique canadienne.

Ingénieurs Canada croit en la nécessité d’augmenter le nombre d’étudiants autochtones en génie, surtout à la lumière des conclusions et recommandations de la Commission de vérité et réconciliation du Canada, à savoir la nécessité d’éliminer les écarts en matière d’études et d’emploi entre les Autochtones et les non-Autochtones, la nécessité que d’autres organismes professionnels offrent une formation en matière de compétences culturelles et de droits de la personne ainsi que l’importance de mener une vaste consultation et de veiller à un accès équitable à l’emploi, à la formation et à l’enseignement (Commission de vérité et réconciliation du Canada, 2015a).

Cela étant, de nombreux établissements d’enseignement postsecondaire ont proposé d’indigéniser l’éducation, dont l’Université de Windsor (Malley, 2015), l’Université de la Saskatchewan (Foster, 2016), l’Université de Regina, la First Nations University of Canada (Pete, Schneider et O’Reilly, 2013), l’Université de la Fraser Valley (sans date), l’Université Mount Royal (Academica Group Inc., 2015) et l’Université Carleton (Hickman, 2014).

Ces appels à l’action indiquent que les administrateurs postsecondaires reconnaissent la nécessité que leurs établissements d’enseignement évoluent de manière à inclure les Autochtones et les modes d’apprentissage autochtones. Pour répondre à cette nécessité en génie, il importe d’examiner quelques-uns des nombreux obstacles qui empêchent historiquement (et continuellement) les Autochtones d’étudier en génie. Ce n’est que depuis les années 1970 que les membres des Premières Nations sont autorisés à poursuivre des études postsecondaires sans crainte de perte de statut ou de privation de droits (Anonson, Desjarlais, Nixon, Whiteman et Bird, 2008; Doran et coll., 2015; Prince Albert Grand Council, 2005). Selon Goldfinch et Kennedy, « une longue histoire de dépossession, par les établissements, des terres, de la langue, de la culture et de l’identité des Autochtones a engendré une certaine méfiance envers ces établissements » [traduction] (2013, p. 5), surtout si l’on tient compte de l’histoire des pensionnats (qui ont pris fin dans les années 1990) et d’autres pratiques d’assimilation (R.A. Malatest & Associates Ltd. et le Conseil des ministres de l’Éducation [Canada] [CMEC], 2002).

Le chômage, la pauvreté, les études secondaires insuffisantes — notamment dans les collectivités éloignées où des cours de sciences et de mathématiques préalables ne peuvent pas être offerts — et le peu d’information sur les possibilités de carrière sont autant de facteurs qui limitent l’accès à l’enseignement postsecondaire en génie pour les apprenants autochtones (Adams et coll., 2005; R.A. Malatest & Associates Ltd. et le Conseil des ministres de l’Éducation [Canada] [CMEC], 2002; Smith, McAlister, Tedford Gold et Sullivan-Bentz, 2011). Plus précisément, 29 % des Autochtones du Canada n’ont pas terminé leurs études secondaires. Pour les Indiens inscrits, ce nombre augmente à 35 % (Statistique Canada, 2013).

Les avantages de l’amélioration de la représentation des peuples autochtones et des modes d’apprentissage autochtones en génie ne se limitent pas à l’innovation. Ils comprennent également la création d’une voix positive pour la profession au sein des collectivités autochtones, la sensibilisation au génie et la création de modèles à émuler pour les jeunes, ainsi que l’amélioration des résultats des projets (Goldfinch et Kennedy, 2013). Cela aura des répercussions sur les générations futures, au fur et à mesure que les jeunes se familiarisent avec les ingénieurs et leur profession, et qu’ils deviennent plus enclins à faire carrière en génie.

Certains efforts sont faits pour inciter les Autochtones à s’inscrire aux programmes postsecondaires de génie et à les maintenir aux études. Le programme Engineering Access Program (ENGAP) de l’Université du Manitoba existe depuis 30 ans et a produit plus de 100 diplômés autochtones en génie (Herrmann, 2012). Le programme Aboriginal Access to Engineering est offert depuis peu à l’Université Queen’s; sa portée va au-delà des études postsecondaires en génie, et il fournit aux enseignants et aux parents des jeunes apprenants du matériel adapté à la culture autochtone en vue de stimuler leur intérêt en mathématiques et en sciences (Queen’s University Aboriginal Access to Engineering, 2016).

Cependant, pour combler l’écart entre les étudiants autochtones et non autochtones en ce qui concerne l’obtention de diplômes d’ingénieurs, il importe d’en faire davantage au niveau de l’enseignement postsecondaire, et ce, partout au pays.

Dans le présent rapport

Dans notre rapport, nous nous concentrons sur les sept volets d’un programme réussi visant à accroître la probabilité que les étudiants autochtones persévèrent dans leur transition vers un enseignement postsecondaire en génie. Nous ne traiterons pas ici du recrutement des étudiants autochtones en génie. Le recrutement commence souvent à l’école primaire et se poursuit par des initiatives visant à recruter des étudiants du secondaire. Nous ne ferons pas état de la complexité ni de la diversité de ce travail. De même, nous ne préciserons pas les mesures nécessaires pour maintenir les étudiants autochtones aux études postsecondaires en génie; nous traiterons plutôt exclusivement de la transition de l’école secondaire à un établissement postsecondaire.

Le rapport est en grande partie un travail d’examen et de synthèse des renseignements accessibles. Il vise à susciter une conversation et devra être constamment étoffé. Les volets décrits correspondent aux premières étapes de conceptualisation des programmes, traitées sous l’angle des facettes nécessaires à la transition des étudiants vers des études postsecondaires en génie. Nous avons conclu chaque section par un tableau qui servira à guider les conversations.

Méthodes

Sources des données

Nous avons consulté plusieurs sources de données pour établir les pratiques consensuelles. Nous avons reçu en entrevue les directeurs des programmes existants, conformément à la recommandation de Love (2004), Loucks?Horsley (1996), Cousins et coll. (2004). Puis, nous avons réalisé une analyse documentaire des rapports de ces programmes d’accès au génie. Cette analyse se fondait sur des articles revus par des pairs accessibles au moyen d’un système de bibliothèques universitaires, sur des sources gouvernementales et sur les dossiers disponibles des programmes existants.

Pratiques consensuelles

1. Capacité d’évaluation et publication

La première pratique consensuelle consiste à renforcer les capacités d’évaluation et à contribuer à la recherche universitaire. En élargissant la capacité d’évaluation des programmes, les gestionnaires de programme montrent qu’ils satisfont aux exigences des bailleurs de fonds, qu’ils soutiennent ceux et celles qui participent à l’exécution des programmes d’accès, qu’ils obtiennent de nouveaux fonds et qu’ils apportent de nouvelles améliorations aux programmes (Preskill et Boyle, 2008). Volkov et King (2007) ont mis au point une liste de vérification du renforcement des capacités d’évaluation organisationnelle (Checklist for Building Organizational Evaluation Capacity) pour orienter l’intégration de cette capacité au sein des organismes. En tirant parti de ressources de ce genre, les gestionnaires de programmes seront en mesure de prendre des décisions éclairées tout au long de la mise en œuvre et de la prestation des programmes (Preskill et Boyle, 2008).

À ce stade, il serait souhaitable que la faculté de génie délègue ou embauche une personne-ressource ayant pour tâche de faciliter cette relation et de mettre en place le programme d’accès (Labun, 2002). Le rôle de ce membre du personnel prendra de l’ampleur en fonction de l’évolution du programme d’accès et des besoins de la faculté. Certains cours et ateliers de perfectionnement professionnel peuvent aider cette personne et les employés associés à son poste à travailler avec la collectivité et avec les futurs étudiants.

S’il y a lieu, le personnel peut se familiariser avec l’évaluation au moyen de documents, de ressources en ligne ou de formations formelles, ou encore au moyen du renforcement des capacités, avec l’aide d’un évaluateur contribuant à la réalisation d’évaluations participatives ou émancipatrices (Preskill et Boyle, 2008). En outre, la Société canadienne d’évaluation (http://evaluationcanada.ca/fr) offre des relations mentor et mentoré, une conférence nationale, des webinaires, des lignes directrices en matière de pratique éthique et beaucoup d’autres ressources (Société canadienne d’évaluation, 2014).

Les programmes et le personnel qui s’emploient à internaliser les procédures, les systèmes et les politiques d’évaluation tireront parti de cette pratique. Preskill et Boyle (2008) offrent des conseils afin d’assurer la durabilité de la capacité d’évaluation des programmes. Il faudrait former des équipes d’évaluation afin de soutenir l’enseignement et de déployer des évaluations réussies. L’évaluation devrait constituer l’un des rôles ou l’une des responsabilités des membres du personnel et être intégrée à leurs tâches quotidiennes.

Indigénisation et évaluation décolonisée

L’évaluation décolonisée est fondée sur l’épistémologie autochtone. Les objectifs, les valeurs et les savoirs de la collectivité participante devraient être au cœur de l’évaluation (Johnston?Goodstar, 2012). Les évaluations décolonisées sont pratiquées en fonction du savoir que la collectivité estime utile, de la façon dont elle acquiert ce savoir et des personnes avec qui elle le partage (Hopson, Bledsoe, Kirkhart et Mertens, 2012; Johnston?Goodstar, 2012; T. Smith, 1999). Les peuples et les collectivités autochtones devraient avoir le pouvoir de décider des données et des processus qui sont authentiques et légitimes (Hopson et autres, 2012). L’évaluation doit non seulement enrichir les connaissances occidentales, mais également être avantageuse pour la collectivité (Kawakami, Aton, Cram, Lai et Porima, 2008). Les personnes de la collectivité qui sont tenues en haute estime doivent déterminer la qualité de l’évaluation et des données. Cette démarche inclut la consultation de ces personnes dans le respect des pratiques culturelles appropriées. Les résultats très appréciés pour des raisons culturelles ou spirituelles devraient être considérés comme aussi importants que les résultats trouvés par des praticiens ou par des bailleurs de fonds occidentaux (Kawakami et autres, 2008).

Johnston?Goodstar (2012) recommande l’emploi de groupes consultatifs en matière d’évaluation pour décoloniser l’évaluation efficacement. De tels groupes feront en sorte que les épistémologies autochtones demeurent au cœur de l’évaluation et que les questions posées dans l’évaluation revêtent de l’importance pour la collectivité (Hopson et coll., 2012; Johnston?Goodstar, 2012).

À la page 337 de leur rapport, Kawakami et ses collaborateurs (2008) fournissent un tableau comparatif des cadres autochtones et occidentaux pour la pratique de l’évaluation. Le tableau offre une présentation pertinente de certaines distinctions en matière de pratique d’évaluation. Plus loin dans leur rapport, ils font part d’une étude de cas sur l’évaluation décolonisée qui peut aider certains lecteurs à comprendre ce qui constitue une bonne pratique.

Lors du renforcement des capacités d’évaluation et du partage des résultats, la mise en œuvre d’un programme d’accès peut être évaluée par rapport aux pratiques consensuelles figurant dans le tableau A. 

Tableau A : Capacité d’évaluation et publication?

  1. La liste de vérification du renforcement des capacités d’évaluation organisationnelle de Volkov et King (2007) est utilisée.
  2. Le personnel d’évaluation et les membres du comité reçoivent des renseignements sur l’évaluation et la gestion du rendement.
  3. La pensée évaluative est incorporée à l’élaboration du programme.
  4. Les résultats des évaluations et de la mise en œuvre du programme sont communiqués au moyen de publications et de ressources documentaires.
  5. Des mesures sont prises pour décoloniser l’évaluation :
    1. a. une dotation en personnel a été effectuée;
      b. des membres de la collectivité qui sont tenus en haute estime donnent des conseils sur les objectifs, les valeurs et ce qui constitue des données.

2. Partenariat communautaire

Au début de l’élaboration d’un programme concernant les Autochtones, il est impératif de consulter efficacement la collectivité visée par le programme. Cette première consultation doit par la suite se transformer en participation et en partenariat communautaires (Johnston?Goodstar, 2012; Nguyen, 2014; R.A. Malatest & Associates Ltd. et le Conseil des ministres de l’Éducation [Canada] [CMEC], 2002). Il faut absolument déterminer si le programme d’accès envisagé est réellement souhaité par la collectivité et commencer à établir la meilleure façon de travailler ensemble. Au cours du processus, il importe de s’entendre sur les besoins à satisfaire et sur les objectifs réalisables compte tenu des ressources, de l’expertise et d’autres facteurs. Il faut définir les limites et la portée du programme, ainsi que les secteurs où les participants ont une influence (Goldfinch et Kennedy, 2013).

Curran, Solberg, LeFort, Fleet et Hollett (2008) ont évalué un programme d’accès à des soins infirmiers au Labrador. Dans leurs conclusions, ils rédigent une norme de pratique pour la collaboration. Les étapes qu’ils ont mises au point sont devenues les étapes 3 à 10 du tableau à la fin de cette section et dans l’annexe I.

De même, Nguyen (2014) a décrit trois volets pour une consultation efficace en milieu urbain, soit le développement, l’autonomisation et le renforcement des relations. Dans son document, il évalue si la stratégie pour les Autochtones en milieu urbain à Toronto confère aux partenaires autochtones « la capacité de participer efficacement au processus de consultation » [traduction] (p. 1). Cet exemple peut être utile lors de l’évaluation de la relation entre les gestionnaires de programmes d’accès, les facultés de génie et les collectivités autochtones en milieu urbain.

Idéalement, la consultation est un processus continu auquel la collectivité participe en permanence. Une participation continue au-delà de la première consultation de la collectivité devrait être encouragée et planifiée (Goldfinch et Kennedy, 2013). La participation, le partenariat et le contrôle de la collectivité pourraient constituer de meilleurs moyens de réaliser les objectifs du programme (Nguyen, 2014).

Les besoins, les rôles de chaque intervenant et les limites doivent être discutés, définis et convenus. Il faut s’efforcer de comprendre ce que chaque intervenant juge le plus important, ainsi que la façon dont chacun mesure la réussite.

De nombreux auteurs ont traité de l’importance d’une collaboration éthique et efficace avec les collectivités autochtones. Les employés des programmes doivent examiner les pratiques qui conviennent le mieux à leur situation. Indigenous Corporate Training Inc. (2015) et le Conseil des ressources humaines autochtones (sans date) donnent accès à des ressources supplémentaires sur les partenariats communautaires, y compris du matériel de formation et des études de cas.

Le partenariat communautaire est un volet discret, mais il sous-tend néanmoins tous les autres volets proposés dans le présent rapport. C’est pourquoi il devrait être intégré aux programmes, si possible et s’il y a lieu.

Lors de l’établissement d’un partenariat communautaire, la mise en œuvre d’un programme d’accès peut être évaluée par rapport aux pratiques consensuelles figurant dans le tableau B. Des exemples de preuves de réalisation et des repères sont énumérés dans l’annexe pour certains paramètres. Il faut tenir compte de tous les volets et critères qui y sont associés à des fins d’échantillonnage. 

Tableau B : Partenariat communautaire?

  1. Une personne-ressource est embauchée afin de faciliter la relation entre la collectivité et les intervenants de l’enseignement postsecondaire, ainsi que de gérer le programme d’accès.
  2. Des possibilités de perfectionnement professionnel sont offertes aux personnes de l’établissement d’enseignement postsecondaire qui participent au programme d’accès.
  3. Un nombre approprié d’intervenants et de partenaires participent à la conception et à la mise en œuvre du programme d’accès.
  4. L’ensemble des intervenants et des partenaires semblent être prêts à collaborer et à faire des compromis.
  5. On observe un sentiment de responsabilité, de contribution et de prise décisionnelle partagées entre l’ensemble des intervenants et des partenaires.
  6. Les rôles et responsabilités des intervenants et des partenaires sont bien définis.
  7. Tout au long de la conception et de la mise en œuvre, une communication efficace et régulière a lieu entre les intervenants et les partenaires.
  8. Il existe un moyen efficace de déceler et de résoudre les conflits entre les intervenants et les partenaires.
  9. Les intervenants et les partenaires partagent une compréhension réaliste, concrète et réalisable des buts et des objectifs, qui sont évalués et fixés.
  10. On observe une direction efficace (Curran et coll., 2008).

3. Définition de la population étudiante cible et de ses besoins

Selon Hayes et Monaghan (1995) (dans Omeri et Ahern, 1999), il arrive souvent que les administrations ne tiennent compte des Autochtones qu’en fonction du nombre d’entre eux inscrits à leurs programmes alors que les peuples autochtones, en réalité, maintiennent des centaines de langues, de cultures, d’épistémologies et de points de vue différents (Omeri et Ahern, 1999). Une consultation, une participation et un partenariat efficaces nécessitent l’examen du programme dans le cadre d’un système de facteurs interdépendants (Goldfinch et Kennedy, 2013). Des services de soutien seront nécessaires en fonction des besoins des étudiants ciblés par le programme (Herrmann, 2012). Cette tâche est mieux remplie par un comité, en particulier par les personnes qui participent à la mise sur pied et à l’approbation des mécanismes de soutien, par celles qui sont familiarisées avec les services de soutien offerts sur le campus et par celles qui interagiront avec le programme d’accès et avec ses étudiants.

En définissant les étudiants que le programme d’accès désire recruter, une attention particulière devrait être accordée aux transitions qu’ils effectueront au moment de fréquenter pour la première fois un établissement d’enseignement postsecondaire (Assemblée des Premières Nations, 2012; Wesley-Esquimaux et Bolduc, 2014). Déménagent-ils d’une réserve éloignée de la ville? Vivent-ils dans une famille qui peut s’occuper des enfants? Ont-ils une expérience d’études postsecondaires? Les étudiants pourraient avoir besoin d’un certain soutien durant cette transition (Herrmann, 2012; Assemblée des Premières Nations, 2012; Wesley-Esquimaux et Bolduc, 2014).

Une évaluation des besoins devrait avoir lieu après l’étape de la définition de la population étudiante cible afin d’évaluer systématiquement les besoins des étudiants. L’évaluation devrait chercher à comprendre les besoins scolaires, sociaux, culturels, familiaux et financiers des futurs étudiants.

L’efficacité des programmes repose sur la prise en compte de facteurs historiques, sociaux, culturels, familiaux et personnels (R.A. Malatest & Associates Ltd. et le Conseil des ministres de l’Éducation [Canada] [CMEC], 2002). Bien qu’il ne s’agisse pas d’une liste exhaustive, les paramètres mentionnés ici peuvent faciliter l’amorce du processus de définition des caractéristiques générales de la population étudiante et des secteurs à prendre en compte lors de l’évaluation des besoins. Cette liste comprend l’identité culturelle, le genre, les responsabilités familiales, la géographie (région urbaine, rurale, éloignée ou réserve), la langue maternelle, l’âge et l’expérience éducative antérieure. Wesley-Esquimaux et Bolduc (2014) traitent en détail des expériences selon le genre des diplômés de l’enseignement postsecondaire.

Les gestionnaires de programme se doivent de tenir également compte de l’intersectionnalité de ces identités (Doran et coll., 2015). Durant l’enquête sur les besoins des étudiants, nous recommandons aux employés participants de remettre en question leurs hypothèses personnelles ou collectives, qui se fondent souvent sur nos propres pratiques et normes culturelles ancrées ou sur des stéréotypes. En prenant le temps de connaître ses futurs étudiants, même s’ils ne sont encore qu’hypothétiques, la faculté se familiarisera avec leur expérience de vie et sera mieux à même de recommander les services qui leur conviennent. Le personnel du programme et de l’établissement saisiront ainsi des besoins qu’ils n’auraient pas pu déceler autrement ou acquerront une compréhension de l’importance relative de ces besoins.

En plus d’orienter la mise en œuvre du programme d’accès, la réalisation d’une évaluation des besoins peut faciliter l’obtention d’un financement. L’évaluation indique que les gestionnaires de programme ont l’intention d’offrir des services répondant aux besoins des étudiants, ce qui favorise la réussite du programme (Work Group for Community Health and Development, 2015). L’évaluation des besoins permettrait également de déterminer les services de soutien existants qui répondent aux besoins des futurs étudiants. L’évaluation devrait être effectuée de façon cyclique au fil de l’évolution du programme dans les années suivantes afin qu’il continue d’offrir le soutien nécessaire sans interruption des services (Office for Victims of Crime, 2010). Les responsables du programme peuvent décider de la fréquence des évaluations.

Lors de la définition de la future population étudiante et de leurs besoins, la mise en œuvre d’un programme d’accès peut être évaluée par rapport aux pratiques consensuelles figurant dans le tableau C. Des exemples de preuves de réalisation et des repères sont énumérés dans l’annexe pour certains paramètres. Il faut tenir compte de tous les volets et critères qui y sont associés à des fins d’échantillonnage.

Tableau C : Définition de la population étudiante cible et de ses besoins

  1. Formation d’un comité, incluant des membres des groupes suivants :
    • la collectivité autochtone consultée dans le tableau A;
    • le personnel du programme d’accès;
    • des personnes connaissant bien les mécanismes de soutien de l’établissement postsecondaire.
  2. Évaluation des besoins afin de déterminer le soutien le plus pertinent pour les futurs étudiants.
  3. Le personnel du programme d’accès et d’autres personnes concernées font état d’une bonne compréhension des besoins et des expériences des futurs étudiants.
  4. Énumération d’une liste des mesures de soutien dont la population étudiante pourrait avoir besoin, en fonction de l’évaluation des besoins.
  5. Planification de la fréquence de l’évaluation des besoins

4. Admission non normalisée

Les établissements ont réussi à créer un volet d’admission parallèle permettant aux étudiants autochtones de faire leur demande d’admission (Usher, Miller, Turale et Goold, 2005). De nombreux établissements d’enseignement postsecondaire offrant un programme de génie ainsi que certains programmes de génie proprement dit ont conçu des processus d’admission parallèles pour les candidats autochtones qui choisissent d’utiliser ce mode d’admission (Doran et coll., 2015; Herrmann, 2012).Le personnel du programme d’accès devrait former un comité d’application composé de membres provenant de programmes de génie, du personnel du programme d’accès, d’évaluateurs de demandes d’admission, de membres de la collectivité, d’étudiants autochtones en génie et de nouveaux diplômés (Labun, 2002). Les employés qui ne font pas partie du programme d’accès devraient être encouragés à y participer. Cela permet au personnel n’ayant pas eu l’occasion de discuter activement avec des étudiants autochtones de comprendre leurs besoins, leur histoire et leurs expériences. Notons que le système d’admission parallèle doit être distinct, mais tout aussi rigoureux que l’autre (R.A. Malatest & Associates Ltd. et le Conseil des ministres de l’Éducation [Canada] [CMEC], 2002).Le comité d’admission définira les critères d’admission appropriés et un processus visant à déceler les qualités souhaitables indicatives de la réussite d’un étudiant dans un programme de génie (Curran et coll., 2008). Labun (2002) a suggéré que ces critères comprennent la capacité de persévérer en vue de l’atteinte des objectifs fixés, le soutien existant et l’aptitude aux études. Il faut tenir compte non seulement des relevés de notes et du CV, mais également de la réussite d’un étudiant au travail, au sein de sa collectivité ou dans sa vie familiale.Le modèle du Red River College, tel que le décrit Labun (2002), propose que chaque candidature soit examinée par une équipe de cinq personnes. Chacune d’entre elles doit examiner de façon indépendante la demande et décider si le demandeur remplit les conditions d’admission. Si la majorité est d’accord, le demandeur passe alors une entrevue. L’entretien vise à examiner l’étudiant de manière holistique, en tenant aussi compte de son intérêt pour le domaine d’études. Le comité décide ensuite s’il retient ou non la candidature. Si la demande est rejetée, il donne alors au candidat des conseils sur la façon de se préparer ou sur les points à améliorer s’il décide de présenter une nouvelle demande. Les membres du comité d’admission qui sont actuellement étudiants en génie et qui, en cas de candidature retenue, deviendraient les pairs du demandeur, devraient être exclus du comité de sélection. Cette mesure fait en sorte que les candidats puissent parler librement et que les pairs ne disposent pas de renseignements pouvant être de nature très personnelle.Lors de la création d’un processus d’admission non normalisée, un programme d’accès peut évaluer sa mise en œuvre par rapport aux pratiques consensuelles figurant dans le tableau D. Des exemples de preuves de réalisation et des repères sont énumérés dans l’annexe pour certains paramètres. Il faut tenir compte de tous les volets et critères qui y sont associés à des fins d’échantillonnage. 

Tableau D : Admission non normalisée

  1. Le comité d’admission au programme d’accès est formé et inclut des membres des groupes suivants :
    • la collectivité autochtone consultée;
    • le personnel du centre d’admission existant;
    • les étudiants actuels qui se définissent comme étant autochtones. (Remarque : Ces étudiants devraient être exclus du processus de sélection, car le candidat peut révéler des renseignements confidentiels auxquels un futur pair ne devrait pas avoir accès.)
    • des membres du corps professoral de génie. (Remarque : Bien qu’il soit utile d’avoir des professeurs dûment formés ou informés des problèmes auxquels sont confrontés les apprenants autochtones, ce comité pourrait aussi être l’occasion de sensibiliser les membres du corps professoral qui n’ont pas interagi avec les collectivités autochtones. )
  1. Le comité élabore des critères d’application mesurables et indicatifs de la réussite.
  2. Le comité élabore le processus de demande d’admission pour les étudiants.
  3. Le comité conçoit le processus d’examen des demandes d’admission.
  4. Des personnes sont choisies pour étudier les demandes d’admission, dont des étudiants actuellement inscrits. 

5. Aide financière

L’aide financière pour payer les frais de scolarité, les manuels, les frais de subsistance, le transport, la garde d’enfants et d’autres dépenses devrait être considérée comme un facteur important pour favoriser l’accès des étudiants autochtones à des études postsecondaires en génie. Selon une étude, ces coûts constituent le plus grand obstacle à l’achèvement des études postsecondaires des Autochtones en milieu urbain (Environics Institute, 2010). Le soutien financier est souvent la clé du recrutement et du maintien aux études (Smith et coll., 2011). L’aide fondée sur le mérite et celle axée sur les besoins ont toutes deux une incidence sur l’inscription postsecondaire, mais c’est celle accordée en fonction des besoins qui a « la plus grande incidence » sur les inscriptions dans les établissements postsecondaires (Ness et Tucker, 2008). Récemment, l’Université McMaster a transféré une partie des fonds alloués à l’aide financière fondée sur le mérite à l’aide axée sur les besoins, dans le but d’accroître l’accessibilité (McMaster University, 2016). Cette mesure est avantageuse à bien des égards, mais elle l’est tout particulièrement pour les étudiants autochtones inscrits à l’université.Il est également possible de financer des étudiants dans le cadre de programmes comme l’Indigenous Peoples – Industry Partnership Program offert à l’Université de la Saskatchewan. Les étudiants autochtones en génie y reçoivent une aide financière par l’entremise de fonds parrainés par l’industrie. En retour, les étudiants s’engagent à travailler trois étés chez l’entreprise qui les a parrainés (Dunn, 2015).On constate beaucoup de désinformation sur l’accès des Autochtones à l’aide financière au cours de leurs études postsecondaires (Doran et coll., 2015; R.A. Malatest & Associates Ltd. et le Conseil des ministres de l’Éducation [Canada] [CMEC], 2002). Historiquement, les Métis, les Indiens non inscrits et les Autochtones visés par le projet de loi C?31 n’étaient pas admissibles à une aide financière (R.A. Malatest & Associates Ltd. et le Conseil des ministres de l’Éducation [Canada] [CMEC], 2002). Cependant, une récente décision de la Cour suprême (« Daniels c. la Reine », 2016) est susceptible de rendre les Métis et les Indiens non inscrits admissibles au financement postsecondaire (Madden, Frame, Davis et Strachan, 2016). Avant cette décision, le financement attribué aux bandes des Premières Nations provenait de la vente de droits fonciers et miniers par, notamment, ces peuples. L’argent est distribué par un fonds fiduciaire autochtone créé par le gouvernement fédéral. Les personnes admissibles (soit les « Indiens inscrits » faisant partie d’une bande) peuvent demander à celle-ci de l’aide financière pour des études postsecondaires. Cependant, l’aide financière reçue par les étudiants qui sont des Indiens inscrits suffit rarement à payer les dépenses sans cesse croissantes liées aux études postsecondaires et au coût de la vie (Doran et coll., 2015).Au moment de la création d’un programme de transition ou d’une autre orientation, la mise en œuvre d’un programme d’accès peut être évaluée par rapport aux pratiques consensuelles figurant dans le tableau E. Des exemples de preuves de réalisation et des repères sont énumérés dans l’annexe pour certains paramètres. Il faut tenir compte de tous les volets et critères qui y sont associés à des fins d’échantillonnage. 

Tableau E : Aide financière

  1. Déterminer le pourcentage minimal des dépenses des étudiants à rembourser.
  2. Une planification financière et des mesures de soutien d’urgence sont-elles offertes?
  3. Les étudiants sont au courant du soutien financier offert.
  4. Les étudiants ne sont pas réticents à accéder à des services de soutien.
  5. Les mesures de soutien à la disposition des étudiants sont promues (Curran et coll., 2008).

6. Mise en place de services de soutien

L’Environics Institute (2010) a établi un lien entre, d’une part, les étudiants autochtones en milieu urbain qui se sentent pris en charge tout au long de leurs études postsecondaires et, d’autre part, le degré de réussite scolaire de ces étudiants. Les établissements postsecondaires devront allouer des ressources matérielles et humaines aux étudiants afin de faciliter leur adaptation à la vie sur le campus (Smith et coll., 2011). L’évaluation des besoins réalisée, recommandée précédemment lors de la définition de la population étudiante cible, aidera le personnel du programme d’accès à trouver ou à instaurer de bonnes mesures de soutien à l’intention des nouveaux étudiants. Il se peut que ces mesures existent déjà au sein de la faculté de génie, de l’établissement postsecondaire ou de la collectivité et, le cas échéant, il faudra les trouver. Cependant, certaines peuvent être particulières et nécessiter des solutions et des partenariats novateurs. Ces services de soutien demeureront importants tant que les étudiants fréquenteront l’établissement postsecondaire, mais ils répondront probablement aux besoins les plus aigus au moment de la transition de ces étudiants vers les études postsecondaires. Les services de soutien sont essentiels à la persévérance des étudiants autochtones tout au long du programme de génie ainsi qu’au maintien de leur moral et de leur rendement (R.A. Malatest & Associates Ltd. et le Conseil des ministres de l’Éducation [Canada] [CMEC], 2002).Les étudiants peuvent avoir besoin de soutien pour différents aspects de leur vie. Ce soutien peut notamment prendre la forme d’un service de garde, d’une aide pour trouver un logement, d’un accès aux transports, d’une orientation scolaire, d’un counselling individuel, d’un perfectionnement professionnel, d’une planification de carrière ou d’un tutorat (Environics Institute, 2010; Herrmann, 2012; R.A. Malatest & Associates Ltd. et le Conseil des ministres de l’Éducation [Canada] [CMEC], 2002). On a observé que le soutien familial était essentiel à la réussite des études postsecondaires des étudiants autochtones en milieu urbain (Environics Institute, 2010).Labun (2002) suggère que les employés de soutien, y compris les professeurs et les conseillers, se réunissent régulièrement pour discuter de chaque étudiant, et que ces réunions se tiennent plus fréquemment si l’étudiant vient de commencer ses études postsecondaires. Les réunions doivent être plus fréquentes si le personnel juge que l’étudiant a besoin d’une aide supplémentaire ou si l’étudiant en fait la demande. Voici des comportements exigeant des réunions plus fréquentes : s’absenter d’un cours, obtenir des notes inférieures à un certain seuil ou avoir un comportement indiquant une mauvaise gestion de la transition.Grâce à une évaluation modulée d’un programme d’accès aux soins infirmiers, Curran et ses collaborateurs (2008) ont défini un ensemble de normes permettant au programme de déterminer l’efficacité de la prestation des services de soutien aux étudiants. Les cinq critères proposés par les auteurs pour mesurer cette efficacité sont numérotés 4a à 4e dans le tableau se trouvant à la fin de la présente section et dans l’annexe I.Même si la mise en place de services de soutien est essentielle, il importe de ne pas traiter la transition vers les études postsecondaires comme un moyen d’intégrer les étudiants. Au contraire, les services de soutien doivent renforcer la capacité des étudiants autochtones à travailler dans des contextes multiples, tout en traitant leur capital culturel et social avec respect. Les étudiants qui étudient à l’étranger sont reconnus par la culture majoritaire comme ayant acquis des aptitudes interculturelles importantes qui devraient accélérer leur avancement professionnel. Il faut veiller à ne pas traiter les étudiants autochtones, qui acquièrent les mêmes aptitudes interculturelles, comme si leur langue ou leur culture représentaient un handicap.Lors de la mise en place de services de soutien, la mise en œuvre d’un programme d’accès peut être évaluée par rapport aux pratiques consensuelles figurant dans le tableau F. Des exemples de preuves de réalisation et des repères sont énumérés dans l’annexe pour certains paramètres. Il faut tenir compte de tous les volets et critères qui y sont associés à des fins d’échantillonnage. 

Tableau F : Mise en place de services de soutien

  1. 1. Désigner les pairs dans l’évaluation de la population étudiante qui bénéficie de services de soutien (existants ou à mettre en place).
  2. 2. Déterminer si ces services de soutien sont suffisamment adaptés à la culture autochtone; les réviser s’il y a lieu.
  3. 3. Établir un plan de communication pour renseigner les étudiants sur les services de soutien.
  4. 4. Mesurer si les étudiants sont suffisamment au courant des services de soutien à leur disposition. (Curran et coll., 2008)
    • les services et les soutiens aux étudiants ont été mentionnés, et des efforts ont été faits pour offrir le niveau de services et de programmes répondant aux besoins :
    • les étudiants sont au courant des services de soutien offerts;
    • les étudiants ne sont pas réticents à accéder à des services de soutien;
    • les étudiants sont satisfaits du soutien offert;
    • les mesures de soutien à la disposition des étudiants sont promues.

7. Programmes de transition et autre orientation

Les programmes de transition aident les étudiants à améliorer leurs compétences, à suivre des cours de première année ou à s’acclimater à la culture postsecondaire avant de commencer un programme de génie. Il s’agit de programmes d’orientation qui durent plusieurs années ou plusieurs semaines, selon les cas. Les programmes de transition peuvent être mis en œuvre au sein de la collectivité d’accueil d’un étudiant, dans un collège associé, à l’établissement d’enseignement postsecondaire où l’étudiant a été admis ou dans une combinaison de ces lieux (Herrmann, 2012; Labun, 2002; R.A. Malatest & Associates Ltd. et le Conseil des ministres de l’Éducation [Canada] [CMEC], 2002). La prestation dans la collectivité minimise les contraintes sociales, culturelles et financières (R.A. Malatest & Associates Ltd. et le Conseil des ministres de l’Éducation [Canada] [CMEC], 2002), tandis que les programmes offerts dans les collèges associés ou dans un établissement postsecondaire permettent à l’étudiant de s’acclimater à la culture postsecondaire (Labun, 2002).Les programmes de transition peuvent simplement servir à effectuer une mise à niveau scolaire. La préparation des étudiants au calcul, à la physique ou à la chimie peut les familiariser avec le style des classes postsecondaires, atténuer le besoin pour ces cours dans les politiques d’admission et aider les étudiants à se sentir prêts lorsqu’ils entrent en classe (Herrmann, 2012; Labun, 2002). Le programme offre des cours dans d’autres matières comme le professionnalisme, les responsabilités des étudiants, la planification de carrière ou la formation linguistique (Labun, 2002). Les étudiants adultes peuvent se familiariser de nouveau à la routine scolaire dans le cadre d’un programme de transition ou, tout simplement, d’un programme d’orientation (communication personnelle avec le directeur du programme ENGAP, 2015).Dans certains établissements, les étudiants sont tenus de réussir le programme de transition avant de poursuivre leur programme de génie, comme c’était le cas pour les étudiants en soins infirmiers inscrits au Red River College (Labun, 2002). D’autres permettent aux étudiants d’étudier dans leur collectivité et de suivre des cours d’été dans un établissement d’enseignement postsecondaire (R.A. Malatest & Associates Ltd. et le Conseil des ministres de l’Éducation [Canada] [CMEC], 2002).Les programmes qui nécessitent une plus grande participation communautaire tirent parti des ressources au sein de la collectivité pour offrir des services d’enseignement postsecondaire. Des programmes comme le BUNTEP (Brandon University’s Northern Teacher Education Program) ont permis aux étudiants et aux membres de la collectivité de participer à la conception et à la mise en œuvre du programme. Ce type de programme a également aidé des étudiants à trouver un emploi lié à leur domaine d’études (R.A. Malatest & Associates Ltd. et le Conseil des ministres de l’Éducation [Canada] [CMEC], 2002).

Programmes d’orientation

Dans certains cas, des orientations spécialisées conviennent mieux que des programmes de transition complets. D’autres programmes offrant une orientation au cours de la première année d’études dans un établissement postsecondaire sont à même de renseigner efficacement les étudiants autochtones sur les études postsecondaires. L’orientation renseigne les étudiants sur d’importants services de soutien, facilite leur transition vers les études postsecondaires et les présente à leurs futurs collègues. Le programme ENGAP de l’Université du Manitoba explique aux étudiants les systèmes électroniques de l’Université, y compris l’inscription et le courrier électronique, ainsi que son système de bibliothèque. Les étudiants participent à un bref cours visant à évaluer et à actualiser les principales compétences scolaires. Le programme présente aux étudiants les services de soutien scolaires, personnels, sociaux et financiers à leur disposition. Le programme offre également des renseignements sur la ville de Winnipeg, les règles de l’Université et les rôles des étudiants (communication personnelle avec le directeur ENGAP, 2015).Au moment de la création d’un programme de transition ou d’une autre orientation, la mise en œuvre d’un programme d’accès peut être évaluée par rapport aux pratiques consensuelles figurant dans le tableau G. Des exemples de preuves de réalisation et des repères sont énumérés dans l’annexe pour certains paramètres. Il faut tenir compte de tous les volets et critères qui y sont associés à des fins d’échantillonnage. 

Tableau G : Programme de transition et autre orientation

  1. À partir de l’évaluation des besoins, définir les compétences professionnelles et scolaires que les étudiants ont besoin de mettre à jour.
  2. Déterminer la faisabilité et la portée appropriée de la prestation (communautaire, sur le campus, autre orientation, etc.).
  3. Déterminer les conséquences de l’achèvement du programme de transition ou d’orientation (ce qui est obligatoire à l’entrée, crédits des cours, information seulement).
  4. Mesurer la confiance, l’anxiété et le sentiment de préparation des étudiants durant la « première semaine ».
  5. Présenter les mesures de soutien offertes aux étudiants. 

Recommandations pour les prochaines étapes

Les pratiques consensuelles décrites ci-dessus doivent être quelque peu normatives durant les premiers stades. Comme nous l’avons mentionné dans les volets « Capacité d’évaluation et publication », « Partenariat communautaire » et « Définition de la population étudiante cible et de ses besoins », les solutions doivent absolument correspondre aux besoins des personnes ciblées par les programmes. Il importe de communiquer avec les collectivités autochtones visées par les programmes, de réfléchir au contexte probable des futurs étudiants ainsi que d’embaucher un employé à temps plein dédié au maintien de ces relations et au soutien de ces futurs étudiants.

Limites

Pendant la production du présent rapport, nous n’avons eu accès qu’à peu de documents portant précisément sur le génie au Canada. Nous avons donc utilisé des ressources provenant d’autres disciplines et régions afin de donner des conseils sur la mise en œuvre de programmes d’accès au génie. Nous nous sommes efforcés d’éviter de faire des recommandations panautochtones. Soulignons l’importance pour les gestionnaires de programme et les facultés de génie de tenir compte de leur contexte local et de l’identité culturelle et historique propre à la collectivité avec laquelle ils collaborent.Bien que nous ayons promu l’évaluation à maintes reprises dans notre rapport, nous ne sommes que partiellement parvenus à y inclure des approches évaluatives décolonisées. Nous recommandons que les travaux à venir incorporent et recommandent des procédures d’évaluation décolonisée. Des ressources comme l’étude de Kawakami et ses collaborateurs (2008) fournissent un contexte et une présentation appropriés de l’évaluation décolonisée. Notre rapport ne traite pas du financement des programmes d’accès. Les auteurs d’autres initiatives, comme celles mentionnées ci-dessus, ont examiné le financement — provenant des gouvernements, de l’industrie et de bailleurs de fonds privés — au sein des facultés de leur établissement d’enseignement postsecondaire ou d’établissements collaborant avec celui-ci. Ils concluent que le renforcement de la capacité d’évaluation, recommandée dans notre rapport, favoriserait l’obtention et le maintien d’un financement.

Conclusion

La mise en œuvre de programmes d’accès destinés aux Autochtones améliorerait la représentativité de la profession d’ingénieur par rapport à la répartition démographique canadienne. L’augmentation de la diversité en génie favoriserait l’innovation canadienne et la capacité organisationnelle à penser de façon critique et à résoudre des problèmes complexes. Nous recommandons que les facultés de génie et des sciences appliquées tirent parti des conseils se trouvant dans les sept pratiques consensuelles décrites ici. Tout au long de la mise en œuvre des programmes d’accès, leur personnel devrait établir des mesures de rendement et faire des évaluations. Il faut s’employer à décoloniser les processus d’évaluation, s’il y a lieu. En plus de faciliter l’obtention du financement, une telle évaluation aiderait aussi d’autres personnes à promouvoir l’accès à leurs établissements et améliorerait les programmes pour les étudiants.

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