Le Réseau canadien des associations nationales d’organismes de réglementation (RCANOR) a récemment organisé une discussion virtuelle sur les mandats respectifs des organismes de réglementation et des associations professionnelles.

Le panel a exploré ce que signifie servir une profession, à la fois en assurant la réglementation et en protégeant l’intérêt du public, et en servant les professionnels eux-mêmes et l’ensemble de leur profession. Plus précisément : comment gérer la coexistence de deux organisations distinctes dans un espace similaire, et les considérations et défis inhérents à la création d’organismes distincts.

Claude Balthazard, registraire et vice-président, Réglementation, Human Resources Professionals Association (Ontario), a animé un panel composé de Jody-Lee Farrah, directrice générale et registraire, Alberta College of Social Workers, de Joy Peacock, cheffe de la direction et registraire, College of Registered Nurses of Alberta, et de Richard Spelliscy, registraire et chef de la direction, College of Alberta Psychologists.

Ces trois intervenants représentent un éventail d’expériences. Les psychologues albertains ont scindé leur organisation en 1995 et sont habitués à fonctionner avec un organisme de réglementation distinct de leur association professionnelle. Les infirmières et infirmiers de l’Alberta ont pris la décision de séparer les deux rôles il y a quelques années en 2020, tandis que les travailleuses et travailleurs sociaux de l’Alberta sont actuellement en train de séparer les deux mandats à la suite de l’entrée en vigueur d’une nouvelle législation.

L’une des questions au cœur de la séparation du mandat d’organisme de réglementation de celui d’association professionnelle est de savoir si les mandats d’intérêt public et d’intérêt professionnel s’excluent mutuellement. Pour de nombreux organismes de réglementation à double mandat, la réponse est non. La protection de l’intérêt public est un élément essentiel du statut de membre d’une profession. En outre, il est dans l’intérêt du public de pouvoir compter sur un nombre suffisant de professionnels inscrits, engagés et informés, et les associations professionnelles contribuent à l’atteinte de ces résultats.

« Le parcours pour devenir une profession reconnue passe par l’établissement d’une association professionnelle. Le fait d’être une association professionnelle fait donc partie intégrante non seulement de l’histoire de notre profession, mais aussi des racines et du cœur de notre organisation », a expliqué Jody-Lee Farrah, de l’Alberta College of Social Workers.

Le collège a dû réfléchir à ce que ce changement signifierait pour lui, à l’impact sur ses membres et à l’évolution de la profession. C’est pourquoi il a été difficile de séparer l’organisme de réglementation et l’association professionnelle, ce qui a nécessité de très nombreuses discussions sur l’identité et les objectifs de l’organisme de réglementation et de l’association professionnelle nouvellement formée.

Richard Spellicsy, du College of Alberta Psychologists, a reconnu que les associations professionnelles doivent tenir compte du public. « Des associations fortes conduisent à des éléments de protection du public forts parce qu’elles ciblent l’un des facteurs clés qui constituent un antidote aux problèmes d’inconduite professionnelle, à savoir l’engagement », dit-il. Toutefois, il a constaté que, pour les psychologues, la séparation des mandats permet de clarifier les rôles et de réduire les conflits internes.

Joy Peacock, du College of Registered Nurses of Alberta, a également souligné que la séparation des mandats permettait à la nouvelle association professionnelle de s’étendre à tous les membres intéressés de la profession infirmière, et pas seulement à ceux qui sont titulaires d’un permis d’exercice. Cela signifie que l’organisme de réglementation peut se concentrer spécifiquement sur les titulaires de permis, et que l’association professionnelle pourrait se développer de façon exponentielle et donner une voix aux membres qui ne sont pas titulaires d’un permis d’exercice.

Les trois intervenants n’ont pas manqué de souligner que leur travail ne pouvait se faire sans les associations professionnelles correspondantes.

« Les relations sont essentielles, a déclaré Mme Peacock. Il faut du respect, de la compréhension et reconnaître qu’elles n’en sont qu’à leurs débuts. »

Les trois membres du panel ont donné plusieurs exemples de programmes et d’initiatives menés en collaboration, notamment l’élaboration de programmes de développement professionnel, la formation continue et le travail collectif sur les compétences nécessaires aux pratiques exemplaires, la promotion de la mobilité et les normes nationales.

Ils ont tous convenu de la nécessité de communications constantes entre l’organisme de réglementation et l’association professionnelle, ainsi que du partage de l’information et des ressources, afin de mieux servir les membres et le public.

À l’heure actuelle, la plupart des organismes provinciaux et territoriaux de réglementation du génie font office à la fois d’organisme de réglementation et d’association professionnelle. L’Ontario et le Québec font exception, puisque l’Ontario Society of Professional Engineers (OSPE) et Genium360 au Québec sont des associations professionnelles dans leur province respective.

Pour les organismes de réglementation du génie à double mandat, la principale leçon à tirer serait peut-être de prendre le temps de réfléchir à la façon dont ils répartissent les ressources entre leurs mandats et à la manière dont ils gèrent les conflits internes entre la protection du public et l’intérêt professionnel. Étant donné que ces deux mandats ne sont pas toujours clairement délimités – ni mutuellement exclusifs – les organismes de réglementation du génie devraient réfléchir à leur façon d’interagir avec leurs inscrits. Le fait de savoir quand ils agissent en tant qu’organisme de réglementation et quand ils agissent en tant qu’association professionnelle – en tenant compte des résultats souhaités et les personnes visées – permettra aux inscrits, au public et aux gouvernements de mieux comprendre la valeur qu’ils apportent.