Dans le premier d’une série de deux articles, nous examinons ce que 2021 est susceptible de réserver aux organismes de réglementation du génie, notamment les modifications aux cadres de réglementation et les effets de la COVID-19.

La rapidité du changement et les forces perturbatrices que l’on peut observer dans le monde aujourd’hui ne sont pas nouvelles, mais si nous devons apprendre quelque chose de 2020, c’est la mesure dans laquelle ces changements et ces perturbations peuvent s’avérer intenses et persistants. Les professions autoréglementées n’ont pas pu se soustraire aux grandes nouveautés de 2020, y compris les effets de la pandémie mondiale, un mouvement de protestation grandissant visant à mettre fin à la discrimination et les progrès technologiques continus.

Tenant compte de ces facteurs, nous nous penchons sur les changements que 2021 est susceptible de réserver aux organismes de réglementation du génie. Dans ce premier article d’une série de deux, nous examinons les prochaines modifications aux cadres réglementaires canadien et australien, ainsi que les effets éventuels de la pandémie de COVID-19 sur les organismes de réglementation.

Cadres réglementaires : législation et surveillance

De nombreux experts de l’autoréglementation prédisent un recours accru aux examens externes (lancés de façon autonome ou imposés) ainsi qu’une transition vers un plus grand nombre de lois générales où des professions semblables relèvent du même organisme de réglementation. Les partisans soutiennent que les responsabilités éthiques ne diffèrent pas tant d’une profession à une autre, que la présence d’un organisme de réglementation unique allège le fardeau administratif et que la mise en commun des ressources et des expertises entraîne une amélioration des normes, des services et des programmes. Les examens réglementaires s’inscrivent souvent dans un processus qui vise à déterminer s’il convient d’adopter un modèle-cadre de législation et de surveillance réglementaire.

En Colombie-Britannique, un examen parrainé par le gouvernement a permis de piloter un projet de loi générale et d’ouvrir la porte à un nouvel organisme de surveillance à l’intention des professions du secteur des ressources naturelles. La Professional Governance Act (loi de gouvernance professionnelle) de cette province a reçu la sanction royale en novembre 2018 et devrait prendre effet au début de 2021. Cette loi a permis de mettre en place un nouvel organisme de surveillance appelé Office of the Superintendent of Professional Governance (Bureau du surintendant de la gouvernance professionnelle) en plus d’assujettir à une loi générale six professions réglementées différentes, dont celles des ingénieurs et des géoscientifiques. Quand la nouvelle loi prendra effet plus tard cette année, la loi britanno-colombienne en vigueur, la Engineers and Geoscientists Act sera abrogée. Voici quelques-uns des changements à l’exercice du génie qui seront mis en œuvre au cours des mois à venir :

  • l’obligation de faire rapport sur le développement professionnel continu
  • l’adaptation de la réglementation des entreprises
  • l’augmentation du montant des amendes
  • la normalisation des codes de déontologie
  • la restriction des activités de défense des intérêts
  • l’adoption de règlements par des conseils sans consultation des membres
  • la réduction des conseils et l’augmentation du nombre de représentants du public.

Ces changements auront des effets notables sur les organismes de réglementation du génie, les praticiens, les entreprises, les bénévoles et les autres parties prenantes clés. Engineers and Geoscientists British Columbia travaille fort pour préparer des politiques et des procédures internes en fonction de ces nouvelles exigences, pour communiquer avec les inscrits ainsi que pour établir une collaboration avec l’Office of the Superintendent of Professional Governance afin d’assurer une transition harmonieuse.

Pour en savoir plus : Engineers and Geoscientists British Columbia; Office of the Superintendent of Professional Governance

La mise en application d’une nouvelle loi sur les ingénieurs dans l’État australien de Victoria est une autre nouveauté majeure pour les cadres réglementaires. Bien que la profession d’ingénieur soit déjà beaucoup plus réglementée au Canada qu’en Australie, tout gouvernement qui présente une nouvelle loi permet les comparaisons.

Après Queensland, Victoria deviendra le deuxième État australien à réglementer l’exercice du génie au moment où la Professional Engineers Registration Act 2019 (loi de 2019 sur l’inscription des ingénieurs) prendra effet le 1er juillet 2021. Mise en œuvre par étapes au cours des deux prochaines années, la loi rendra obligatoire l’inscription des praticiens qui fournissent des services professionnels en génie des structures, en génie civil, en génie mécanique, en génie électrique ainsi qu’en génie de la sécurité incendie. Le nouveau code de déontologie prévu par la loi exigera des inscrits qu’ils se conforment à 14 obligations, y compris des dispositions visant à limiter l’exercice de la profession à leurs seuls domaines de compétence ainsi que des dispositions relatives à l’honnêteté et à l’équité. La mise en place de la loi donne à entendre que la population de Victoria reconnaît la nécessité de protéger plus rigoureusement le public dans le cadre de travaux d’ingénierie.

Pour en savoir plus : Government of Victoria Professional Engineers Registration Scheme (système d’admission des ingénieurs du gouvernement de Victoria)

Effets de la COVID-19 : fonctions réglementaires pendant et après une pandémie

Les organismes de réglementation ont été contraints d’adapter avec célérité et souplesse le mode de prestation de leurs services en réponse aux défis sans précédent de la pandémie. Bien des organismes de réglementation ont réussi à transformer rapidement leurs procédures opérationnelles. La nécessité et la résolution pratique de problèmes ont permis de situer dans un nouveau contexte une première évaluation de nombreuses fonctions depuis des années.

Des modifications aux procédures ont été observées dans toutes les sphères de responsabilités des organismes de réglementation, allant de l’inscription à la discipline. En ce qui concerne l’inscription, le recours aux documents matériels originaux a fait place aux copies numérisées, et les portails en ligne ont été mis à niveau pour permettre d’éliminer les demandes reçues par la poste. Les enquêtes et les audiences disciplinaires sont passées à un environnement en ligne ou hybride. Bien des organismes de réglementation ont tenu des réunions de leur conseil en ligne, en plus d’avoir amélioré leur système de vote électronique en vue de leur assemblée générale annuelle. À l’interne, des organismes de réglementation ont également mis à jour leurs politiques et augmenté leurs ressources technologiques pour faciliter la transition vers le télétravail.

Les ingénieurs se sont également adaptés aux imprévus, ayant obtenu beaucoup de résultats positifs. Les programmes de formation continue, des événements en personne, avaient souvent lieu dans des municipalités plus grandes; maintenant, ils sont virtuels et davantage accessibles aux praticiens plus dispersés sur le plan géographique. Une légère hausse du recours au sceau électronique montre que les ingénieurs sont plus nombreux à fournir des services virtuellement.

La pandémie touchera les organismes de réglementation pendant une bonne partie de 2021 et après. La situation leur donne une occasion unique d’évaluer leur état de préparation, leur adaptabilité et leur résilience. La question pour les organismes de réglementation (de même que pour les praticiens, les gouvernements et le public) est de savoir si les changements amenés par la pandémie demeureront et s’ils permettront d’établir une nouvelle norme de service. Les organismes de réglementation pourraient se concentrer sur l’examen des leçons qu’ils ont apprises afin de poursuivre les améliorations positives, de prévoir les conséquences indésirables et de favoriser l’innovation. Les efforts actuels peuvent entraîner une amélioration de la réponse aux incertitudes et aux crises à venir.

Ne ratez pas dans la prochaine publication de Parlons génie le second article de cette série de deux : nous y examinons les pressions répétées et l’évolution des attentes en ce qui a trait à la reconnaissance des titres de compétences étrangers, au rôle des organismes de réglementation en matière d’équité, de diversité et d’inclusion, ainsi qu’aux occasions et aux défis que représentent les mégadonnées.