

Plus tôt cet été, plusieurs organismes canadiens de réglementation du génie ont lancé une campagne visant à attirer l’attention sur l’utilisation frauduleuse des sceaux et des signatures d’ingénieurs, et à rappeler au public et à ceux qui embauchent des ingénieurs l’importance de vérifier les titres de compétences en génie.
La campagne « Verify Before You Hire » (Vérifier avant d’embaucher) est un effort de collaboration entre Engineers Nova Scotia, Ingénieurs et géoscientifiques Nouveau-Brunswick, Engineers PEI et Engineers Yukon. Elle fait suite à des cas réels où des imposteurs ont falsifié des sceaux et des signatures numériques, soumis de fausses demandes de permis de construction et fourni des conseils techniques dangereux ou non vérifiés.
Ces cas ont donné lieu à des enquêtes réglementaires, des poursuites judiciaires et, dans certains cas, des condamnations pénales. Mais partout au pays, le problème demeure une préoccupation majeure, exacerbée par les technologies numériques.
« Se faire passer pour un ingénieur titulaire d’un permis d’exercice constitue un risque grave pour le public, et les incidents de ce genre sont en augmentation, les fraudeurs exploitant l’anonymat numérique et le manque de vérification », indique Pal Mann, P.Eng., chef de la direction et registraire d’Engineers Nova Scotia.
« Historiquement, l’usurpation d’identité nécessitait l’accès à des sceaux ou des signatures physiques, mais l’augmentation du travail numérique, en ligne et à distance a baissé les barrières. Les contrevenants peuvent désormais falsifier des signatures numériques, créer de faux sceaux numériques et opérer de manière anonyme dans différentes zones de compétence, ce qui facilite la commission et la répétition des fraudes », poursuit M. Mann.
En plus des signalements publics aux organismes de réglementation du génie, des cas ont également été découverts sur des plateformes d’embauche en ligne où des documents falsifiés sont fournis aux clients.
La campagne de sensibilisation présente le témoignage anonymisé mais véridique d’un ingénieur dont les titres de compétences ont été falsifiés. « Je n’aurais jamais imaginé voir mon sceau apposé sur des documents d’ingénierie que je n’avais pas autorisés, mais c’est exactement ce qui est arrivé », dit l’ingénieur en question.
Il est essentiel que les personnes ou les entreprises qui embauchent des ingénieurs vérifient la validité de leur permis d’exercice. Au Canada, chaque organisme de réglementation du génie tient un répertoire public des membres inscrits. Avant de conclure une entente ou d’accepter des documents, les particuliers devraient s’assurer que l’ingénieur.e qu’ils embauchent figure dans ce répertoire public, qu’il ou elle est en règle et qu’il ou elle est bien qui il ou elle prétend être. Il ne faut jamais se fier uniquement à des documents numériques, à des courriels ou à des plateformes de travail à la pige pour vérifier et valider l’identité d’une personne.
Si un membre du public soupçonne quelqu’un de se faire passer pour un ingénieur, il doit contacter l’organisme de réglementation provincial ou territorial compétent pour enquêter sur la question. Des liens vers les organismes canadiens de réglementation du génie sont disponibles dans le site d’Ingénieurs Canada. Si un acte criminel est soupçonné, il convient de contacter également les forces de l’ordre locales.
L’ingénieur qui a été victime d’usurpation d’identité reconnaît que ce problème mine non seulement la confiance du public, mais aussi sa sécurité, et fait remarquer que « la profession d’ingénieur est une profession fondée sur la confiance. Lorsqu’une personne viole cette confiance en falsifiant un sceau ou en se faisant passer pour un professionnel titulaire d’un permis d’exercice, elle ne commet pas seulement une fraude, elle met des vies en danger. Elle sape l’ensemble du système. Et elle oblige les ingénieurs en règle, comme moi, à recoller les pots cassés. »
Éradiquer la fraude dans le domaine du génie
La lutte contre l’usurpation d’identité professionnelle nécessite des solutions en amont, qui peuvent inclure :
- Rendre obligatoire l’utilisation de signatures numériques sécurisées. Ces signatures peuvent être liées à des identités vérifiées et sont difficiles à falsifier, ce qui réduit le risque de copie ou de modification non autorisée.
- Les municipalités, les clients particuliers et les entrepreneurs devraient vérifier l’authenticité des sceaux, des signatures et des permis dans les registres publics avant d’accepter des travaux d’ingénierie, en particulier lorsque le mandat a commencé en ligne ou par le biais de plateformes de tiers.
- Continuer à renforcer la collaboration entre les différentes zones de compétence. Les organismes de réglementation coordonnent de plus en plus leurs efforts pour échanger les renseignements sur la fraude, alerter les autorités d’autres régions et inscrire les contrevenants sur des listes noires.
- Il faudrait sensibiliser davantage les professionnels et les clients aux signes et aux risques liés à l’usurpation d’identité dans le domaine du génie. Ces indices peuvent inclure les demandes de paiement par des méthodes (virements électroniques) ou dans des formats (cryptomonnaie) inhabituels, les communications par le biais de services de courriel généraux comme Gmail ou Hotmail, ou les personnes qui prétendent pouvoir apposer leur sceau sur des projets dans un nombre inhabituellement élevé de provinces ou de territoires.
- Des outils de détection des fraudes basés sur l’IA dans les plateformes de messagerie électronique, de gestion des documents et de recrutement devraient être utilisés pour signaler les soumissions anormales ou les soupçons d’usurpation d’identité.
- Utiliser l’authentification à deux facteurs pour vérifier l’identité des ingénieurs qui soumettent des documents, en exigeant que les documents estampillés soient téléchargés uniquement via des portails sécurisés et assurant une traçabilité.
- Les entreprises d’ingénierie et leurs clients devraient veiller à maintenir une bonne hygiène de sécurité, en formant leur personnel à repérer et à signaler les communications et les demandes suspectes ou les lacunes en matière de titres de compétences professionnelles.