En juin, le gouvernement du Canada a communiqué l’exigence de l’Optique des changements climatiques (Optique climatique) dans le cadre de son plan d’infrastructures de 180 milliards de dollars sur 12 ans, Investir dans le Canada.

 

En juin, le gouvernement du Canada a communiqué l’exigence de l’Optique des changements climatiques (Optique climatique) dans le cadre de son plan d’infrastructures de 180 milliards de dollars sur 12 ans, Investir dans le Canada. L’Optique encourage l’innovation et la durabilité à long terme devant les défis croissants que pose le climat. Bien que toutes les incidences de l’exigence ne soient pas encore connues, on voit tout de suite comment, à quelques égards, elles pourront influer sur les ingénieurs qui jouent un rôle dans la conception et la mise sur pied des infrastructures au Canada.

L’Optique climatique touche principalement les ententes bilatérales signées entre Infrastructure Canada et les gouvernements provinciaux et territoriaux, mais elle a aussi des conséquences pour plusieurs programmes fondés sur le mérite — le Fonds d’atténuation et d’adaptation en matière de catastrophes et, dans certains cas, le Défi des villes intelligentes. L’Optique climatique exige que tous les projets d’infrastructures de plus de dix millions de dollars fassent l’objet d’évaluations distinctes portant sur les émissions de gaz à effet de serre prévues, de même que sur l’adaptation et la résilience. De plus, le Programme de l’infrastructure écologique exigera une évaluation pertinente de tous les projets, quel que soit leur coût.

« Dans l’ensemble, l’Optique climatique s’appuie sur des décisions raisonnables concernant l’adaptation aux changements climatiques dans un monde en évolution et sur le soutien à la transition vers une économie à faibles émissions de carbone, affirme Chad Nelson, conseiller principal à Infrastructure Canada. Bien que certains gouvernements provinciaux et territoriaux fassent preuve d’initiative dans ce domaine, l’Optique climatique change la donne en raison de sa portée et de son incidence. »

« Le but ultime est d’amorcer un changement de comportement », fait remarquer M. Nelson.

Il poursuit en disant que, dans l’idéal, les défenseurs du programme commenceront à considérer les actifs différemment, ne prenant pas seulement les coûts en compte, mais aussi les risques à long terme, pour les infrastructures, liés aux changements climatiques. Les modèles actuels d’évaluation des risques se concentrent sur des données historiques, tandis que l’Optique climatique repose sur l’hypothèse selon laquelle l’état futur sera probablement très différent de celui qui l’a précédé.

L’Optique climatique encourage l’adoption d’une approche multidisciplinaire et globale des infrastructures. « Cela amène les entreprises et les planificateurs à concevoir et à construire différemment, ne considérant pas tant les infrastructures comme isolées, mais en relation avec leurs dépendances de réseau », ajoute François Levesque, analyste des politiques à Infrastructure Canada.

Pour mettre au point l’Optique climatique, il a fallu mener des recherches approfondies et de longues consultations pendant plusieurs mois. Infrastructure Canada a voulu tenir compte et apprendre des approches déjà adoptées par des provinces, des territoires et plusieurs municipalités, de même que d’approches adoptées ailleurs dans le monde. En donnant à l’exigence sa forme finale, on a jugé préférable de cibler les professions concernées plutôt que le grand public.

« Ce n’est pas un guide que les profanes peuvent consulter pour régler le problème, poursuit M. Levesque. C’est aux professionnels — ingénieurs, planificateurs et architectes, qui travaillent en équipes multidisciplinaires — de mener ces évaluations. » Il fait remarquer que le document sur les lignes directrices générales sera toujours d’actualité, et souhaite, dans l’idéal, qu’il s’étoffe pour fournir des conseils de plus en plus utiles et pratiques à chaque secteur au fil du temps.

Bien que l’Optique continue d’évoluer, elle présente un certain nombre d’occasions et de défis aux ingénieurs. Le marché des évaluateurs qualifiés, y compris les ingénieurs, connaîtra une forte croissance au cours des années à venir, mais il reste à trouver la meilleure façon de juger qu’un évaluateur est qualifié selon le projet ou le contexte, de même qu’à trouver où une évaluation est susceptible de contredire les exigences en matière d’expertise aux termes du Code de déontologie des ingénieurs.

Les provinces et les territoires ont demandé une liste d’évaluateurs qualifiés, mais l’objectif du gouvernement est de laisser la demande dans l’industrie déterminer la formation de personnes-ressources comme celles-ci.

« Nous sommes assez sûrs que l’industrie répondra aux besoins, fait remarquer M. Nelson. En pratique, il se peut qu’un plus grand nombre d’acteurs disposant des ressources nécessaires prennent les devants et que le phénomène s’étende à partir de là. » En règle générale, l’exigence évite d’imposer le recours à une procédure ou à un protocole précis, puisqu’ils peuvent changer au fil du temps. Comme le rappelle M. Nelson, « nous ne voulons pas nous engager dans une solution unique qui fera obstacle à l’innovation ».

Dans l’ensemble, Infrastructure Canada vise une « approche rationnelle » tirant parti des outils et des pratiques exemplaires existants pour mener les évaluations climatiques, comme celui du protocole du CVIIP, qui fait partie des outils d’évaluation recommandés par le Ministère. Bien que le processus d’évaluation des émissions de gaz à effet de serre soit bien établi, celui applicable à l’adaptation et à la résilience aux changements climatiques est encore relativement nouveau.

Cette situation présentera peut-être de nouvelles occasions en matière de formation en génie, où, bien souvent, les changements climatiques ne font pas encore partie du tronc commun. Les États-Unis ont fait des progrès ces dernières années grâce au lancement du Sustainable Infrastructure Certificate Program (programme de certification des infrastructures durables) par l’American Society of Civil Engineers (ASCE), mais au Canada on peut faire mieux. Le nouveau cours L’ingénierie durable d’Ingénieurs Canada est un pas important dans cette direction.

M. Levesque fait ressortir le potentiel d’innovation découlant de cette approche. « En tant qu’approche axée sur les résultats, fait-il remarquer, l’Optique climatique permettra peut-être l’utilisation de nouveaux matériaux et de nouvelles techniques de construction. Nous voulons pour les infrastructures un environnement propice à l’innovation. »

« Nous avons reçu quelques-unes des premières évaluations, annonce M. Nelson, mais les provinces et les territoires commencent tout juste à comprendre comment ils changeront leur façon de réaliser les infrastructures. » Pour aider les utilisateurs à mieux comprendre l’incidence de l’Optique climatique, Infrastructure Canada a récemment publié un webinaire. Pour de plus amples renseignements, vous pouvez également consulter le document sur les Lignes directrices générales, qui présente l’approche, définit la portée des évaluations et dresse une liste de renseignements précis à soumettre à Infrastructure Canada.

Il va sans dire, toutefois, que l’exigence de l’Optique climatique du gouvernement du Canada aura une incidence considérable sur la profession d’ingénieur dans le cadre des travaux d’infrastructures publiques partout au pays. Surveillez Parlons génie, au cours des mois à venir, où vous trouverez des explications supplémentaires traitant des deux types d’attestations qu’introduit l’Optique climatique : une sur la réduction des gaz à effet de serre et l’autre sur la résilience aux changements climatiques.