**Avertissement : Ce message contient des propos sur la violence fondée sur le sexe et sur le féminicide. Une liste de lignes d’écoute régionales à l’intention des personnes qui en auraient besoin se trouve ici. 

Dans le monde entier, la période du 25 novembre au 10 décembre marque les 16 jours d’activisme contre la violence fondée sur le sexe. Les 16 jours d’activisme constituent une campagne internationale qui vise à prévenir la violence fondée sur le sexe et y mettre fin. 

Au Canada, les 16 jours comprennent également le 6 décembre, soit la journée désignée par le Parlement comme Journée nationale de commémoration et d’action contre la violence faite aux femmes, à la suite des événements du 6 décembre 1989 où 14 femmes, presque toutes des étudiantes en génie, ont été assassinées à l’École polytechnique de Montréal, au Québec. Cette année, le 6 décembre marque le 35e anniversaire de ces féminicides, et chaque année, cette journée est un rappel poignant que la présence de femmes dans tous les domaines, toutes les professions et tous les milieux sociaux peut se heurter à une résistance parfois fatale. 

À l’occasion des 16 jours d’activisme contre la violence fondée sur le sexe, nous réfléchissons à cette réalité dans le domaine du génie et au travail réalisé par Ingénieurs Canada pour faire progresser l’équité des genres dans la profession, et nous proposons des ressources qui peuvent aider les ingénieurs à s’acquitter de leurs responsabilités éthiques envers le public en jouant un rôle dans la prévention de la violence fondée sur le sexe (VFS).

La VFS dans le domaine du génie 

Les racines de la VFS se retrouvent partout, des blagues inappropriées aux insultes, en passant par les comportements discriminatoires, les contacts physiques et les gestes non sollicités, le harcèlement sexuel et l’agression sexuelle. La VFS est présente partout : en milieu de travail, à la maison et à l’école. 

Dans les professions du domaine des STIM, les femmes et les personnes non binaires sont plus susceptibles de subir de la violence que leurs homologues masculins, et des recherches récentes menées par Reidy, Baumler et Temple suggèrent que « ... les progrès de la parité des genres augmentent les occurrences de violence comme moyen de punir les femmes qui sont perçues comme allant à l’encontre de leurs rôles traditionnels et menaçant l’hégémonie masculine ».  

Si la violence touche tout le monde, certaines personnes risquent davantage d’en être victimes en raison de l’intersection de diverses formes d’oppression telles que le racisme, le sexisme, l’homophobie, la transphobie et le capacitisme. Certaines populations subissent des niveaux de violence plus élevés, notamment les femmes, les jeunes femmes et les filles, les femmes et les filles autochtones, les femmes et les filles noires et de couleur, les personnes LGBTQ2S+ (lesbiennes, gais, bisexuels, transgenres, queers, bispirituels) et les personnes de diverses identités de genre, les femmes vivant ou travaillant dans des communautés nordiques, rurales et éloignées, et les femmes en situation de handicap.  

C’est pourquoi le travail d’Ingénieurs Canada en matière d’équité, de diversité, d’inclusion et d’accessibilité s’inscrit dans une perspective intersectionnelle. Aucune identité n’est universelle, et les différentes formes d’oppression et de discrimination s’influencent et se nourrissent mutuellement. Il est important que la « féminité » ne soit pas traitée de manière monolithique et que les nuances d’autres identités, telles que la race, l’ethnicité, l’âge, la capacité et la nationalité soient prises en compte. 

Par exemple, l’an dernier, Ingénieurs Canada a publié un complément au Guide sur l’équité pour les femmes dans les milieux de travail à l’intention des ingénieurs et des firmes d’ingénierie. Ce document, élaboré en collaboration avec Camille Hernández-Ramdwar, auteure, consultante et ancienne professeure associée émérite à l’Université métropolitaine de Toronto, complète le guide et le contextualise en relatant l’histoire de cinq femmes qui ont vécu de la discrimination dans la profession d’ingénieur. Les récits présentés dans ce document comprennent des expériences réelles de violence physique et verbale dans la profession d’ingénieur, et proposent des façons de contrer ces situations.

Un impact disproportionné sur les femmes autochtones 

Selon l’Association des femmes autochtones du Canada, les lois et les systèmes coloniaux comptent parmi les causes principales de la VFS, en particulier à l’égard des femmes des Premières Nations, des Métisses et des Inuits. Les statistiques sont saisissantes : environ six femmes autochtones sur dix ont été agressées physiquement ou sexuellement à un moment donné depuis l’âge de 15 ans, contre quatre femmes non autochtones sur dix. Le nombre de femmes autochtones assassinées est près de sept fois supérieur à celui des femmes non autochtones.  

Nous devons reconnaître les répercussions que les travaux d’ingénierie peuvent avoir sur les communautés autochtones, et en particulier sur les femmes, les filles et les personnes bispirituelles de ces communautés. Par exemple, on a constaté que l’établissement de « camps d’hommes » – des logements temporaires pour des milliers de travailleurs masculins, non autochtones pour la plupart, amenés dans des communautés éloignées, généralement pour des projets d’extraction et d’exploitation – est lié à des taux plus élevés de violence contre les femmes autochtones. 

Ressources pour contrer la VFS 

Nos obligations déontologiques en tant qu’ingénieurs signifient que nous avons tous et toutes un rôle à jouer afin d’empêcher la violence fondée sur le sexe. Les ingénieurs ont le devoir d’être francs, honnêtes et loyaux et d’assurer la protection de la vie humaine. Nous considérons la sécurité, la santé et le bien-être du public comme des objectifs primordiaux. Les ingénieurs doivent reconnaître les façons dont la présence de femmes et de personnes non binaires dans le domaine du génie peut être assujettie à la violence et doivent s’y opposer afin de rendre la profession plus sécuritaire pour toutes et tous. 

Alors que nous marquons les 16 jours d’activisme contre la violence fondée sur le sexe, Ingénieurs Canada propose les ressources suivantes comme point de départ : 

  • Lors de la Conférence 30 en 30 de 2023, après une introduction de Jeanette Southwood, Kim Bouffard, gestionnaire, Appartenance et engagement à Ingénieurs Canada, a animé une discussion avec Paulette Senior, alors directrice générale de la Fondation canadienne des femmes et actuellement membre du Sénat canadien, sur la façon d’aller au-delà du cadre juridique pour mettre en place des milieux de travail qui luttent contre la violence et le harcèlement. Au nombre des sujets abordés figuraient les mythes concernant la violence fondée sur le sexe, les mesures à prendre pour éliminer la honte et le silence de la culture d’un milieu de travail, et les ressources que les survivants et survivantes peuvent utiliser pour évoluer dans des systèmes souvent inadéquats, par exemple, une ressource mise au point pour les personnes ayant été victimes de harcèlement en milieu de travail intitulée AfterMeToo. Les 16 jours d’activisme contre la violence fondée sur le sexe sont l’occasion parfaite de visionner (ou de revoir) cette discussion
  • Le collectif Righttobe.org présente les 5D des interventions du témoin, qui sont « différentes méthodes – distraire, intervenir directement, déléguer, documenter et désapprouver – que vous pouvez utiliser pour aider une personne harcelée, affirmer que le harcèlement est inacceptable et montrer à vos proches qu’ils ont le pouvoir de rendre leur communauté plus sûre. » 

Il est important de se rappeler que les ingénieurs s’engagent à préserver la vie et le bien-être des êtres humains. Le harcèlement et la violence en milieu de travail sont trop répandus, notamment dans la profession d’ingénieur, et nous avons tous un rôle à jouer pour dénoncer et contrer ces injustices lorsqu’elles se produisent.