Les questions concernant le contenu du présent guide doivent être adressées à :
Bureau canadien des conditions d’admission en génie
Ingénieurs Canada
bccag@ingenieurscanada.ca
Avis
Avertissement
Les guides nationaux et les documents d'Ingénieurs Canada sont élaborés par des ingénieurs, en collaboration avec les organismes de réglementation du génie provinciaux et territoriaux. Ces guides sont destinés à favoriser des pratiques uniformes à l’échelle du pays. Ce ne sont pas des règlements ni des règles. Ils visent à définir et à expliquer certains aspects de l’exercice et de la réglementation du génie au Canada.
Les guides nationaux et documents d'Ingénieurs Canada n’établissent pas de norme légale de diligence ou de conduite et ne comprennent ni ne constituent d’avis juridique ou professionnel
Au Canada, le génie est réglementé par les organismes de réglementation du génie en vertu des lois provinciales et territoriales. Ces organismes sont libres d’adopter, entièrement ou en partie, les recommandations contenues dans les guides nationaux et les documents d'Ingénieurs Canada ou de ne pas les adopter. Il revient à l’organisme de réglementation de la province ou du territoire où exerce ou envisage d'exercer l’ingénieur de décider du bien-fondé d’une pratique ou d’une ligne de conduite.
À propos de ce document d'Ingénieurs Canada
Ce document d'Ingénieurs Canada national a été préparé par le Bureau canadien des conditions d’admission en génie (BCCAG) en concertation avec les organismes de réglementation et il est destiné à fournir des orientations à ces organismes. Le lecteur est invité à consulter en même temps les lois et règlements pertinents de l’organisme de réglementation dont il dépend.
À propos d’Ingénieurs Canada
Ingénieurs Canada est l’organisme national constitué des ordres provinciaux et territoriaux qui sont chargés de réglementer l’exercice du génie au Canada et de délivrer les permis d’exercice aux 295 000 membres de la profession.
À propos du Bureau canadien des conditions d’admission en génie
Le Bureau canadien des conditions d’admission en génie est un comité du conseil d’Ingénieurs Canada composé de bénévoles. Il a pour rôle d’offrir du leadership national et des recommandations aux organismes de réglementation en ce qui concerne l’exercice du génie au Canada. À cet égard, il élabore à l’intention des organismes de réglementation et du public des guides et des documents d'Ingénieurs Canada qui permettent d’évaluer les compétences en génie, facilitent la mobilité des ingénieurs et favorisent l’excellence en matière d’exercice et de réglementation du génie.
À propos de l’équité, la diversité et l’inclusion
Par sa nature, le génie est une profession de collaboration. Les ingénieurs collaborent avec des personnes d’horizons divers pour s’acquitter de leurs obligations, de leurs tâches, et de leurs responsabilités professionnelles. Bien que le changement culturel soit une responsabilité collective, les ingénieurs ne sont pas censés s’attaquer à ces questions de façon indépendante. Ils peuvent donc solliciter l’expertise de professionnels de l’équité, de la diversité et de l’inclusion (EDI), et faire appel à des personnes ayant une expertise en matière de changement culturel et de justice, et sont encouragés à le faire.
1 Introduction
Le devoir de dénoncer est une obligation ou une attente légale, professionnelle ou éthique de dénoncer la conduite, les activités ou le comportement d'une autre personne ou d'un groupe de personnes dans le but de protéger le public et l'environnement et de prévenir les dommages qui pourraient leur être causés.
Le présent guide vise à aider les ingénieurs, les firmes d'ingénierie et les autres inscrits* (collectivement appelés « inscrits ») à faire le lien entre leurs obligations professionnelles et déontologiques et la dénonciation ou le signalement d'une conduite et d'un comportement. Une conduite ou un comportement peuvent justifier une dénonciation ou un signalement s’ils sont contraires à l'éthique, illégaux, s’ils présentent un risque pour le public ou, de façon plus générale, s’ils sont contraires aux valeurs inscrites dans le code de déontologie de chaque province et territoire et dans le code de déontologie d'Ingénieurs Canada.
Ce guide se veut également un outil pour les organismes de réglementation de la profession d'ingénieur au Canada (collectivement appelés « organismes de réglementation ») afin de les aider à améliorer, à adopter ou à mettre en œuvre des pratiques exemplaires en ce qui a trait au devoir de dénoncer, et à réglementer leurs inscrits en conséquence.
Il expose aussi les considérations relatives aux dénonciations obligatoires et facultatives (collectivement appelées « dénonciations réglementaires ») tout en accordant la même importance primordiale à la protection de la santé et du bien-être du public et de l'environnement, ainsi qu'à la promotion de la santé et de la sécurité sur le lieu de travail, dans le cadre de la vie quotidienne des inscrits.
2 Limites, zone de compétence et groupes cibles
Le présent guide a des limites quant à son applicabilité et sa mise en œuvre à l'échelle nationale. En d’autres termes, il ne peut créer ni imposer des réglementations ou des règles, mais constituera plutôt un outil pratique pour les inscrits et les organismes de réglementation. Il est conçu pour aider les inscrits à comprendre leur devoir et les options dont ils disposent en ce qui concerne la dénonciation de certains comportements, conduites ou activités.
Le champ d'application de ce guide se limite également à la prestation de conseils aux inscrits et aux organismes de réglementation en ce qui concerne les dénonciations réglementaires des inscrits, conformément aux obligations qui leur incombent en vertu de la législation, de la réglementation, des règlements administratifs et/ou des politiques des organismes de réglementation. Bien que les membres du public puissent faire des dénonciations aux organismes de réglementation, il est rare qu'ils aient le « devoir » de le faire (bien que de tels devoirs existent parfois; par exemple, les employeurs qui ne sont pas des personnes inscrites dans certaines zones de compétence ont le devoir législatif de dénoncer l'inconduite d'un employé inscrit).†
2.1 Aperçu du rôle de l’organisme de réglementation
Les organismes de réglementation ont le mandat prescrit par la loi de protéger l'intérêt public, qui est primordial. Ce mandat comprend la protection de la vie, de la santé, de la propriété, des intérêts économiques, du bien-être public et de l'environnement. Les organismes de réglementation réglementent l'exercice de la profession et régissent leurs membres inscrits de manière à servir et à protéger l'intérêt public.
Le public est convaincu que les ingénieurs possèdent les compétences techniques et éthiques nécessaires pour servir la société et qu'ils ont la volonté de faire passer l'intérêt public en premier. Le public accorde toutefois sa confiance avec prudence, et celle-ci doit être protégée, car elle est fragile et peut se perdre rapidement. Les dénonciations réglementaires jouent un rôle important dans la préservation de la confiance du public et de l'intégrité de la profession.
Dans le cadre de leur mandat de protection du public, les organismes de réglementation peuvent se voir conférer, par le biais de la législation, une obligation ou une attente en matière de dénonciation réglementaire, ou en créer une par le biais de politiques ou de lignes directrices. Ils peuvent choisir ou être tenus de mettre en application la dénonciation réglementaire pour un certain nombre de raisons, notamment parce qu’elle contribue à :
- Garantir la protection de l'intérêt public;
- Régir les inscrits et mettre l'accent sur leurs obligations professionnelles et éthiques de protection du public;
- Protéger l'intégrité de la profession et de ses inscrits.
2.2 Aperçu du rôle des inscrits
Les dénonciations réglementaires sont conformes aux devoirs éthiques des inscrits tels qu’énoncés dans le code de déontologie de chaque organisme de réglementation, qui comprend généralement les devoirs pour les inscrits d'agir avec équité, courtoisie et de bonne foi, de préserver la vie et le bien-être des personnes et de protéger l'environnement.
Dans le cadre de la prestation de services professionnels, ou parfois même en dehors de leur rôle professionnel, les inscrits peuvent découvrir diverses circonstances ou une conduite d'un autre inscrit qui pourraient présenter un risque pour le public. Des exemples de conduites ou de circonstances susceptibles de présenter un risque pour le public sont abordés plus loin, à la section V. Souvent, la conduite en cause et le risque qui y est associé peuvent ne pas venir à l'attention de l'organisme de réglementation à moins qu'une dénonciation réglementaire ne soit faite, ou viendront à l'attention de l'organisme de réglementation seulement après que les risques se sont matérialisés. C'est précisément la raison pour laquelle la dénonciation réglementaire est si importante.
3 Aperçu d’ordre juridique et définitions
Le devoir de dénoncer comprend l'obligation ou l'attente légale, professionnelle ou éthique de dénoncer ou signaler la conduite, les activités ou le comportement d'une autre personne ou d'un groupe de personnes ans le but de protéger le public et l'environnement et de prévenir les dommages qui pourraient leur être causés.
Le devoir de dénoncer peut être obligatoire ou facultatif (regroupé sous l’appellation « dénonciations réglementaires »).
Une dénonciation obligatoire signifie qu'une personne est tenue par la loi de faire une dénonciation. Cette obligation légale dicte souvent les circonstances dans lesquelles une dénonciation doit être faite, le délai dans lequel cette dénonciation doit être faite et la nature de la dénonciation. En règle générale, le fait de ne pas respecter le devoir obligatoire de dénoncer entraîne également des conséquences juridiques (amendes, accusations ou procédures pour inconduite).
Par exemple, les inscrits de la Colombie-Britannique sont tenus par la loi de dénoncer d'autres inscrits identifiés s'il existe des motifs raisonnables ou probables de croire que ceux-ci exercent la profession d'ingénieur d'une manière susceptible de présenter un risque de préjudice important pour la santé ou la sécurité du public ou d'un groupe de personnes, ou pour l'environnement.
Une dénonciation facultative signifie qu'il n'y a pas d'exigence légale pour une personne de dénoncer. Toutefois, la personne est autorisée (et/ou encouragée) à faire une dénonciation si elle estime qu'il est raisonnable de le faire. Les dénonciations facultatives peuvent toujours faire l'objet d'une législation, mais la formulation utilisée sera généralement « peut » au lieu de « doit ».
Par exemple, les inscrits de l'Ontario sont autorisés à dénoncer la faute professionnelle ou l'incompétence d'autres inscrits, sans y être tenus.
D'une manière générale, l'objectif des dénonciations réglementaires est de faciliter ou d'encourager le signalement des comportements risqués ou problématiques aux autorités compétentes pour atténuer le risque et protéger le public. Les inscrits doivent se reporter à la législation, aux règlements et aux politiques en vigueur de leur organisme de réglementation respectif pour déterminer si la dénonciation est obligatoire ou facultative dans une situation donnée.
3.1 Exigences communes ou répandues en matière de dénonciation
De nombreux devoirs de signaler ou de dénoncer sont inscrits dans la législation et dans les politiques applicables à des professions ou à des secteurs spécifiques, et certains s'appliquent même à l'ensemble de la population canadienne. À titre d'exemple, toute personne a le devoir de dénoncer les cas de maltraitance ou de négligence à l'égard d'un enfant en vertu des lois canadiennes sur la protection de l'enfance.
Parmi les autres obligations de dénonciation très répandues, citons l'obligation de dénoncer des conditions de travail dangereuses au ministère fédéral ou provincial du Travail et l'obligation de dénoncer une violation de la vie privée au commissaire fédéral ou provincial à la protection de la vie privée.
Certaines obligations de signalement concernent le type d'informations que les professionnels sont susceptibles de rencontrer dans l'exercice de leur profession. Par exemple, dans certaines zones de compétence, les médecins et autres professionnels de la santé sont tenus de signaler à l'organisme gouvernemental compétent certaines maladies transmissibles, ou encore des patients dont l'état de santé ne leur permet pas de conduire un véhicule à moteur en toute sécurité.
Dans le contexte des dénonciations aux organismes de réglementation professionnelle, la loi impose parfois aux employeurs de professionnels de dénoncer à l'organisme de réglementation toute mesure prise à l'égard du professionnel employé (notamment le licenciement, la suspension ou un congé imposé) à la suite d'une conduite contraire à l'éthique ou dangereuse du professionnel.
La législation peut parfois imposer aux professionnels l'obligation de faire un auto-signalement à leur organisme de réglementation s'ils font l'objet de poursuites pénales, civiles ou réglementaires ou de conclusions de cette nature. Un devoir plus large de signaler leurs préoccupations au sujet d’un de leurs confrères ou consœurs inscrit.e.s peut être imposé aux professionnels lorsque la personne en cause a une conduite contraire à l'éthique ou dangereuse.
4 Cadre juridique et obligations des inscrits
Les principes généraux décrits aux sections II et III étant posés, cette section aborde maintenant les dénonciations réglementaires dans le contexte de la réglementation du génie au Canada et comprend un résumé concis du cadre juridique actuel relatif aux dénonciations réglementaires pour les inscrits. Il importe de noter qu'il ne s'agit que d'un résumé et qu'un examen complet de ce cadre juridique pour chaque organisme de réglementation dépasse la portée de notre guide. Notons également que le cadre juridique régissant les dénonciations réglementaires auprès des organismes de réglementation est susceptible d'être modifié, étant donné que la loi habilitante des organismes de réglementation, ainsi que les règlements, les statuts et les politiques qui en découlent, sont susceptibles d'être modifiés. Par conséquent, il est important que les inscrits tiennent compte des recommandations générales de ce guide parallèlement à la législation, aux règlements et aux politiques en vigueur de leur organisme de réglementation respectif.
Conscients de ces limites importantes, la plupart des organismes de réglementation incluent actuellement dans leur code de déontologie l'attente que les inscrits doivent dénoncer à leur organisme de réglementation, ou à d'autres autorités compétentes, certaines conduites de la part d’inscrits ou d'autres personnes. Bien que les critères de dénonciation varient d'une zone de compétence à l'autre, il s'agit généralement de conduites contraires à l'éthique, illégales ou dangereuses. Bien que toutes les zones de compétence ne les abordent pas explicitement dans leur code de déontologi‡, les dénonciations réglementaires peuvent toujours être considérées comme cohérentes avec d'autres obligations expresses du code de déontologie et comme découlant de ces obligations, telles que les obligations pour les inscrits de :
- Privilégier la sécurité, la santé et le bien-être du public, et protéger l’environnement;
- Se comporter de façon intègre et honnête, avec équité et objectivité dans leurs activités professionnelles;
- Préserver et améliorer l’honneur, la dignité et la réputation de leur profession et, par conséquent, la capacité des professions de servir l’intérêt du public.
Outre les obligations de dénonciation prévues par les codes de déontologie, certaines zones de compétence ont, en matière de dénonciations réglementaires, des exigences établies par la loi, notamment l'obligation pour les inscrits de faire un auto-signalement à leur organisme de réglementation s’ils font l’objet d'enquêtes ou de procédures pénales, civiles et/ou réglementaires.§ Même les organismes de réglementation qui ne sont pas tenus par la loi d’exiger des inscrits qu’ils divulguent l’éventuelle enquête ou procédure dont il font l’objet peuvent l’exiger dans le cadre de la demande de permis initiale et de la demande de renouvellement annuel. **
Une zone de compétence, Engineers and Geoscientists British Columbia, impose aux inscrits l'obligation de dénoncer d'autres inscrits identifiés s'il existe des motifs raisonnables ou probables de croire que l'inscrit identifié exerce la profession d'ingénieur d'une manière qui pourrait présenter un risque de préjudice important à la santé ou à la sécurité du public ou d'un groupe de personnes, ou à l’environnement. La législation régissant les inscrits en Colombie-Britannique†† prévoit également, au bénéfice des inscrits et des employeurs qui dénoncent une situation, des dispositions relatives à la protection contre les représailles (communément appelée « protection des dénonciateurs »). Parmi les mesures de représailles qui sont interdites, citons le licenciement lorsque le dénonciateur est un employé ou le dépôt d’une plainte contre le dénonciateur, par exemple, une plainte pour diffamation.
5 Situations dans lesquelles une dénonciation réglementaire pourrait ou devrait être faite
5.1 Dénonciations d’inscrits
5.1.1 Considérations générales
Les organismes de réglementation ont le mandat prescrit par la loi de protéger l'intérêt public, et les dénonciations ou signalements réglementaires sont mis en application par les organismes de réglementation afin de remplir ce mandat. La protection de l'intérêt public consiste à faire en sorte que les inscrits exercent le génie d'une manière sécuritaire, éthique et professionnelle et à se prémunir contre les risques tangibles pour le public, tels que les risques pour la vie, la santé, l'environnement, la propriété, les intérêts économiques et le bien-être du public.
Il est important de noter que le risque posé doit être lié au non-respect, de la part de l'inscrit, des normes d'exercice du génie d'une manière qui crée ce risque, et non aux risques inhérents à un domaine d'exercice particulier. La gestion des risques fait partie intégrante de l'exercice du génie et il est généralement admis que les travaux d'ingénierie ne peuvent souvent pas être réalisés sans aucun risque, mais qu'ils doivent être réalisés avec un niveau de risque acceptable, conformément aux normes d'exercice relatives à ce domaine d'activité particulier. ‡‡ Le Guide public sur la gestion des risques d'Ingénieurs Canada fournit des conseils utiles sur les processus et les stratégies de gestion des risques que les inscrits peuvent utiliser pour s'assurer que les travaux d'ingénierie sont réalisés en maintenant un niveau de risque acceptable. §§ Toutefois, lorsqu'un inscrit ne respecte pas ces normes d'exercice et que les risques qui sont posés dépassent le niveau généralement accepté, l'organisme de réglementation peut être amené à prendre des mesures pour protéger l'intérêt public.
Par exemple, l'énergie nucléaire présente un risque environnemental faible, mais contrôlé. Lorsqu'un ingénieur nucléaire respecte les normes d’exercice et maintient le niveau de risque dans les limites généralement acceptées, aucune mesure réglementaire ne sera probablement justifiée. En revanche, si l'ingénieur nucléaire enfreint les normes d’exercice d'une manière qui entraîne des risques supérieurs au niveau généralement accepté, l'organisme de réglementation peut être amené à prendre des mesures pour protéger l'intérêt public.
En outre, la protection de l'intérêt public comprend la protection d'intérêts moins tangibles, notamment la protection de la perception qu’a le public du professionnalisme et de l'intégrité des ingénieurs et du génie en tant que profession. Par conséquent, la réglementation de la conduite non professionnelle, même lorsqu'elle ne crée pas de risque évident et tangible pour le public, relève toujours du mandat d'intérêt public de l'organisme de réglementation. En effet, une conduite non professionnelle peut détériorer la perception qu'a le public du génie en tant que profession. ***
Voici une liste d’exemples de circonstances dans lesquelles un organisme de réglementation peut déterminer qu'une dénonciation réglementaire est nécessaire ou encouragée, cette liste n’étant cependant pas exhaustive :
- Procédures ou conclusions pénales : En ce qui concerne les poursuites ou les conclusions pénales, les organismes de réglementation s'intéressent généralement aux crimes de turpitude morale. La turpitude morale est généralement définie comme une conduite jugée contraire aux normes collectives en matière de justice, d’honnêteté et de bonnes mœurs.††† Lorsqu'un inscrit est accusé ou reconnu coupable d’un crime de turpitude morale, on peut craindre qu'il ne soit pas « de bonne moralité », celle-ci étant une exigence que tous les inscrits doivent respecter lorsqu’ils obtiennent leur permis d’exercice ainsi que tout au long de leur pratique professionnelle. ‡‡‡ Une liste des crimes impliquant une turpitude morale figure dans le Guide d'Ingénieurs Canada sur la bonne moralité. Parfois, une condamnation au pénal peut, en soi, être considérée comme un acte d'inconduite. À ce titre, les inscrits peuvent être tenus ou encouragés à signaler eux-mêmes avoir fait l’objet de pareille condamnation, le cas échéant, ou à dénoncer d'autres personnes ayant fait l'objet d'une condamnation de cette nature. Les obligations spécifiques en matière de dénonciations varient d'une zone de compétence à l'autre; une dénonciation peut être exigée ou encouragée dès l'ouverture de la procédure, ou seulement à la fin de la procédure, lorsque les conclusions sont établies.
- Procédures ou conclusions civiles : En ce qui concerne les procédures ou les conclusions civiles, les poursuites directement liées à l’exercice de l’inscrit (comme les poursuites pour faute professionnelle) peuvent faire craindre que l’inscrit n'exerce pas sa profession de manière compétente, sécuritaire ou éthique. En outre, à l'instar des procédures pénales, les procédures civiles peuvent également soulever des inquiétudes quant à la bonne moralité de l’inscrit, même si les allégations ne sont pas directement liées à son exercice. Par exemple, les procédures civiles invoquant une violation des droits de la personne (comme une conduite discriminatoire fondée sur des motifs protégés) peuvent soulever des inquiétudes quant à la bonne moralité de l'inscrit. Consultez le guide d'Ingénieurs Canada sur la bonne moralité pour plus de renseignements sur la discrimination et les motifs protégés. Bien que les obligations en matière de dénonciation varient d'une zone de compétence à l'autre, contrairement aux procédures pénales, les inscrits ne sont généralement pas tenus ni encouragés en cette matière lors de l'ouverture d'une procédure civile, mais plutôt à la fin de la procédure, et uniquement lorsque les conclusions sont établies. Bien qu'une décision finale assortie de conclusions puisse éventuellement être utilisée par un organisme de réglementation pour prendre des mesures réglementaires, il importe de noter que toutes les preuves soumises au cours d'une procédure sont généralement soumises à la règle de l'engagement implicite, c’est-à-dire qu'elles ne peuvent être utilisées à aucune fin en dehors de la procédure civile sans l'autorisation du tribunal. Ainsi, toute preuve obtenue au cours d'une procédure civile ne peut être soumise à un organisme de réglementation dans le cadre d'une dénonciation réglementaire sans l'autorisation du tribunal.
-
Enquêtes, procédures ou conclusions réglementaires : En ce qui concerne les enquêtes, les procédures ou les conclusions réglementaires, il n'est pas rare que les inscrits obtiennent un permis d’exercice et exercent le génie dans plus d'une province ou d'un territoire canadien. Lorsqu'une enquête, une procédure ou une conclusion d'un organisme de réglementation d'une province ou d'un territoire porte sur la question de savoir si l’inscrit a commis une faute professionnelle ou s'il est apte à exercer le génie, cette question intéressera les organismes de réglementation des autres provinces ou territoires où l’inscrit exerce également le génie.
De plus, les enquêtes, les procédures ou les conclusions d'autres organismes de réglementation peuvent également soulever des préoccupations quant à la compétence, à la sécurité et à l’éthique de l’exercice de l’inscrit ou quant à la moralité de ce dernier. Par exemple :
- Une enquête menée par un commissaire provincial ou fédéral à la protection de la vie privée concernant une atteinte aux renseignements personnels d’un client;
- Une enquête menée par un organisme de réglementation environnementale concernant des préoccupations relatives aux dommages environnementaux causés par un projet dont l’inscrit est ou était responsable;
- Une enquête menée par une municipalité concernant des infractions au code du bâtiment liées à un projet dont l’inscrit est ou était responsable;
- Une procédure devant un tribunal des droits de la personne alléguant que l’inscrit a commis des violations des droits de la personne, telles que la discrimination ou le harcèlement fondé sur des motifs protégés.
Comme dans le cas des affaires criminelles et civiles, les détails liés au fait d’exiger ou d’encourager la dénonciation varient en fonction de la zone de compétence; il se peut que les inscrits soient tenus ou encouragés à faire une dénonciation lors de l’ouverture d’une enquête et/ou à la fin de la procédure, lorsque les conclusions sont établies. Il peut arriver qu'une enquête soit en cours et que les allégations ou la plainte soient frivoles, vexatoires ou sans fondement, ou qu'elles ne donnent lieu à aucune action. L'existence d'une enquête ne doit donc jamais être considérée comme la preuve formelle d'une faute professionnelle. Lorsque les organismes de réglementation exigent ou encouragent la dénonciation au stade de l'enquête, une pratique exemplaire consisterait à veiller à ce qu'il y ait également un suivi du résultat de l'enquête.
- Compétence : La compétence signifie généralement d’avoir les connaissances, les compétences et le jugement nécessaires pour fournir les services d'ingénierie en question. Le membre inscrit ne doit offrir ses services ou entreprendre des travaux d’ingénierie que dans ses domaines de compétence, compétence qu’il a acquise par sa formation et son expérience.
Parmi les exemples d’incompétence dans le cadre de la prestation de services d’ingénierie, mentionnons :- Ne pas fournir une supervision adéquate pour les travaux d'ingénierie dont l'inscrit est responsable;
- Fournir des services qui dépassent le champ de formation, d'expertise ou de pratique de l'ingénieur;
- Ne pas se conformer aux exigences réglementaires relatives à l'utilisation du sceau professionnel de l'inscrit.
- Ne pas appliquer la diligence requise, ce qui démontre une pratique non qualifiée.
- Conduite contraire à l'éthique ou à la déontologie : Chaque organisme de réglementation a établi un code de déontologie qui énonce les attentes en matière d’exercice éthique du génie. Il importe de s'assurer que tous les membres adhèrent à ces pratiques éthiques pour garantir la confiance du public à l’égard de l'intégrité des ingénieurs et du génie en tant que profession. Voici quelques exemples de pratiques contraires à l’éthique et à la déontologie :
- Fournir des services professionnels d'ingénierie en ayant un conflit d'intérêts non divulgué;
- Adopter un comportement inapproprié tel que le harcèlement sexuel, la discrimination ou l'intimidation;
- Accepter ou offrir des paiements occultes ou tout autre avantage lors de l'exécution d'un mandat d'ingénierie ou en vue de l'obtenir;
- Facturer de manière frauduleuse ou soumettre un compte faux ou trompeur pour des services.
-
Aptitude à l’exercice : Dans le contexte réglementaire canadien, l'aptitude à l’exercice fait généralement référence à la santé physique et mentale nécessaire pour fournir au public des services sécuritaires, compétents, prudents, diligents et conformes à l'éthique. Un inscrit n'est pas apte à exercer s'il est frappé d'incapacité, ce qui signifie que :
- L’inscrit souffre d'une affection, d'un trouble ou d'une maladie médicale, physique ou mentale ; et
- Son état de santé :
i. Le rend incapable de s'acquitter entièrement de ses responsabilités professionnelles; ou
ii. A un impact sur sa capacité à exercer ses responsabilités professionnelles de telle sorte que son permis ou son certificat d’inscription devrait être assorti de conditions ou de restrictions.Il convient de noter qu'un inscrit n'est pas frappé d'incapacité simplement parce qu'il présente une affection médicale, physique ou mentale qui pourrait avoir une incidence sur sa capacité à exercer. S’il saisit bien la façon dont son état pourrait avoir ou a un impact sur sa capacité à exercer et qu'il gère volontairement son état ou limite son exercice de façon à fournir des services de manière compétente et sécuritaire, l'inscrit n'est pas frappé d'incapacité.
Les questions d'incapacité deviennent généralement problématiques lorsque l'inscrit ne saisit pas ou refuse d'accepter que son état de santé a un impact sur sa capacité à exercer de manière compétente et sécuritaire. Dans ce cas, si l’inscrit n'a pas conscience de l'impact de son état sur sa capacité à exercer, une dénonciation réglementaire peut souvent s'avérer nécessaire pour atténuer le risque pour le public. Voici quelques exemples de conditions susceptibles de donner lieu à une constatation d'incapacité :
- Consommation ou abus de substances (par exemple, drogues, alcool);
- Problèmes de santé cognitive (par exemple, démence, maladie d'Alzheimer);
- Problèmes de santé physique (par exemple, lésions cérébrales, cancer, troubles neurologiques, limitations imposées par le médecin);
- Santé mentale (dépression, anxiété, stress post-traumatique).
Le fait d'obliger ou d’encourager les inscrits à s’auto-signaler ou à signaler d'autres inscrits pour des questions d'aptitude peut être très complexe et soulever un certain nombre de questions juridiques et éthiques. Pour cette raison, dans les zones de compétence où les organismes de réglementation obligent ou encouragent les inscrits à s’auto-signaler ou à signaler d’autres inscrits pour des questions d’inaptitude, il existe généralement des exigences et des mesures de soutien législatives ou des orientations importantes à cet égard pour la profession.
5.1.2 Auto-signalement, par des inscrits individuels ou des entreprises inscrites
Dans certaines zones de compétences, la loi impose aux inscrits l’obligation de se signaler à leur organisme de réglementation lorsqu'ils font l'objet d'enquêtes, de procédures ou de conclusions réglementaires, civiles ou pénales dans d'autres zones de compétences. §§§ Les organismes de réglementation peuvent également exiger l’auto-signalement des inscrits en cas d'enquêtes, de procédures ou de constatations les visant, et ce, par le biais d'une politique qui peut être mise en œuvre au moment de l’obtention du permis d’exercice ou de son renouvellement annuel, ou même dans un délai précis à la suite d’un événement particulier.
5.1.3 Dénonciation d’autres inscrits, par des inscrits individuels
Les dénonciations réglementaires peuvent être effectuées (ou exigées) par un inscrit au sujet d'un autre inscrit.****
La question primordiale qu'un inscrit doit se poser lorsqu'il envisage de faire une dénonciation réglementaire est de savoir si les circonstances donnent raisonnablement lieu de croire que l’exercice de l'inscrit visé pose un risque important pour l'intérêt public. En procédant à cette évaluation, il est important que l'inscrit tienne compte du fait que la protection de l'intérêt public comprend la protection des intérêts tangibles et intangibles. Ainsi, la protection de l'intérêt public comprend l'atténuation des risques tangibles pour le public, tels que les risques pour la vie, la santé, l'environnement, la propriété, les intérêts économiques et le bien-être du public. La protection de l'intérêt public comprend également la protection d'intérêts moins tangibles, notamment la protection de la perception qu’a le public du professionnalisme et de l'intégrité des ingénieurs et du génie en tant que profession.††††
En règle générale, l’exigence en matière de dénonciation obligatoire sera fondée sur une norme de décision raisonnable (ou un libellé semblable contenu dans la législation applicable).‡‡‡‡ Cette norme signifie que le dénonciateur n'a pas besoin d'être certain qu'il existe un risque pour l'intérêt public pour que la dénonciation réglementaire soit justifiée. Si les faits dont dispose le dénonciateur donnent raisonnablement lieu de croire qu'il peut y avoir un risque pour l'intérêt public, cela suffit pour justifier une dénonciation réglementaire. Il s’agit d’un seuil relativement bas.
5.1.4 Dénonciation d’autres inscrits, par des entreprises inscrites
Les entreprises inscrites devraient appliquer le même principe que celui énoncé ci-dessus à la sous-section 5.1.3 pour les inscrits individuels lorsqu'il s’agit pour elles de déterminer si une dénonciation réglementaire concernant un autre inscrit est nécessaire ou appropriée.
Les entreprises inscrites devraient également reconnaître qu'elles sont particulièrement bien placées pour faciliter et soutenir les dénonciations réglementaires parce qu'elles sont plus susceptibles que la moyenne des inscrits individuels d'avoir connaissance d'une conduite pouvant poser un risque pour l'intérêt public. Les entreprises inscrites peuvent recevoir des dénonciations concernant la conduite d'un de leurs employés inscrits de la part de collègues, de clients ou d'autres personnes, ou peuvent avoir connaissance d'une telle conduite par d'autres moyens.
En Colombie-Britannique, les entreprises inscrites sont expressément tenues d'avoir un code de conduite écrit qui énonce comment elles assureront le respect des exigences législatives, notamment le devoir de dénoncer.
Si un inscrit individuel salarié d’une entreprise inscrite signale à son entreprise des préoccupations concernant la conduite de celle-ci, cette démarche à elle seule ne suffira pas à remplir les obligations professionnelles et éthiques de l'inscrit concernant la dénonciation réglementaire. Il est essentiel de consulter et de prendre en compte les exigences provinciales et territoriales spécifiques à cet égard. Toutefois, même en l'absence d'une obligation légale, si l’inscrit n'est pas satisfait des mesures prises par son entreprise pour régler le problème de conduite et le risque qui en résulte pour le public, ou s'il n'est pas informé de ces mesures, il peut vouloir faire une dénonciation directement à l'organisme de réglementation.
5.2 Dénonciation de non-inscrits
5.2.1 Considérations générales
Dans le code de déontologie de nombreuses zones de compétences, le devoir de dénoncer va au-delà de l'auto-signalement et de la dénonciation d'autres inscrits. Les inscrits peuvent être tenus ou encouragés à dénoncer toute conduite qui présente un risque pour le public, que la personne concernée soit ingénieur.e ou pas.
L’autorité compétente pour recevoir une dénonciation concernant une personne non inscrite dépend de plusieurs facteurs, notamment de l'existence d'une législation applicable, de la nature de la conduite et du risque pour le public. Par exemple, si la conduite présente un risque pour l'environnement, le ministère fédéral ou provincial de l'Environnement sera l'autorité compétente. En cas de fraude ou d'autres activités illégales, c'est la police locale qui est l'autorité compétente. Les inscrits peuvent souhaiter obtenir des conseils sur la dénonciation d’un non-inscrit, à savoir s'il convient de la faire, à qui et de quelle manière.
Les exemples suivants illustrent les circonstances dans lesquelles une dénonciation réglementaire peut être nécessaire ou encouragée, bien que cette liste ne soit pas exhaustive :
- Employeurs ou clients : L'employeur ou le client d'un inscrit peut choisir de rejeter ou d'ignorer une décision ou une recommandation d'ingénierie. S’il pose un risque pour l'intérêt public, ce choix est contraire à l’obligation de l’inscrit de protéger le public.
- Exercice du génie sans permis : Chaque zone de compétence interdit qu’une personne ou une entité ne détenant pas de permis d’exercice délivré par l’organisme de réglementation de la zone de compétence en question exerce le génie ou utilise le titre d’« ingénieur » ou une variante de ce titre. D'autres actes susceptibles de faire croire au public que la personne est autorisée à exercer le génie, comme l'utilisation d'un sceau, sont également en principe interdits. La loi habilitante de chaque organisme de réglementation autorise l’organisme à prendre des mesures coercitives à l'encontre des personnes physiques ou morales qui exercent le génie sans permis, pareilles mesures pouvant se traduire pour la personne ou l’entité par de fortes amendes à payer. L'exercice du génie sans permis peut présenter un risque pour le public et, par conséquent, il peut être justifié ou obligatoire de faire une dénonciation à l'organisme de réglementation.
- Autres professionnels titulaires d’un permis : Les inscrits peuvent travailler dans des milieux interdisciplinaires avec des professionnels agréés par d'autres organismes de réglementation (architectes, arpenteurs-géomètres, forestiers, avocats, etc.) Si un inscrit s'inquiète du fait qu'un autre professionnel exerce sa profession d'une manière contraire à l'éthique ou présentant un risque pour le public, il peut être nécessaire ou approprié qu’il fasse part de ses inquiétudes à l'organisme de réglementation du professionnel en question.
5.2.2 Dénonciation de non-inscrits, par des inscrits individuels
Dans le contexte de la dénonciation de personnes non inscrites, la question primordiale qu'un inscrit doit se poser est de savoir si la conduite de la personne non inscrite présente un risque pour l'intérêt public. Cela implique généralement des risques tangibles, tels qu'un risque pour la vie, la santé, l'environnement, la propriété, les intérêts économiques et le bien-être public.
Le Guide d’Ingénieurs Canada sur le code de déontologie fournit des conseils sur la façon de gérer les situations dans lesquelles l'employeur ou le client d'un inscrit a l'intention de rejeter ou d’ignorer une décision d'ingénierie et que cela pose un risque pour le public :
- L'inscrit doit expliquer clairement à l'employeur ou au client les conséquences que peut avoir le fait de rejeter ou d’ignorer sa décision ou sa recommandation.
- S’il est salarié, l’inscrit doit d'abord aviser l'employeur.
- Si l'employeur ne répond pas de manière adéquate aux préoccupations de l'inscrit, ce dernier doit soulever la question directement auprès du client. Si l'inscrit agit en tant que consultant et qu'il n'a pas d'employeur, le problème peut être soulevé en premier lieu avec le client.
- Si les tentatives de résolution du problème par l'employeur et/ou le client s’avèrent infructueuses, l’inscrit doit dénoncer le problème à l'organisme de réglementation ou à toute autre autorité compétente.
- Les inscrits doivent veiller à ne pas conclure d'ententes juridiques qui iraient à l'encontre de l’obligation de dénoncer.
En règle générale, l’exigence en matière de dénonciation obligatoire sera fondée sur une norme de décision raisonnable (ou un libellé semblable contenu dans la législation applicable).§§§§ Cette norme signifie que le dénonciateur n'a pas besoin d'être certain qu'il existe un risque pour l'intérêt public pour que la dénonciation réglementaire soit justifiée. Si les faits dont dispose le dénonciateur donnent raisonnablement lieu de croire qu'il peut y avoir un risque pour l'intérêt public, cela suffit pour justifier une dénonciation réglementaire. Il s’agit d’un seuil relativement bas.
5.2.3 Dénonciation de non-inscrits, par des entreprises inscrits
Les entreprises inscrites devraient appliquer le même principe que celui énoncé ci-dessus à la sous-section 5.2.2 pour les inscrits individuels lorsqu'il s’agit pour elles de déterminer si une dénonciation réglementaire concernant un non inscrit est nécessaire ou appropriée. Tel que décrit dans cette sous-section, lorsqu'un client a l'intention de rejeter ou d'ignorer une décision ou une recommandation d'ingénierie et que cela pose un risque pour le public, l’entreprise inscrite a l'obligation d'aviser le client que son intention est contraire à l'obligation pour l’entreprise inscrite de protéger le public. Celle-ci doit expliquer clairement au client les conséquences que peut avoir le fait de rejeter ou d’ignorer sa décision ou sa recommandation.
Si les tentatives de résolution du problème par l'employeur et/ou le client s’avèrent infructueuses, l’entreprise inscrite peut être tenue ou encouragée à dénoncer le problème à l'organisme de réglementation ou à toute autre autorité compétente. Les inscrits doivent veiller à ne pas conclure d'ententes juridiques qui iraient à l'encontre de leur devoir légal ou éthique de dénoncer. Il est conseillé aux inscrits de demander un avis juridique sur toute disposition contractuelle relative à la confidentialité.
6 Processus de dénonciation
6.1 Avant de dénoncer
Les inscrits qui ne savent pas s'ils doivent ou non faire une dénonciation peuvent consulter la législation, les règlements et les lignes directrices publiées de leur organisme de réglementation ou d'un autre organisme de réglementation compétent en matière de dénonciation. Les inscrits peuvent également s'adresser directement à leur organisme de réglementation ou à un autre organisme de réglementation pour savoir dans quelles circonstances une dénonciation doit être faite ou est encouragée, ou demander un avis juridique.
Avant de décider de faire une dénonciation réglementaire, il peut être opportun pour l’inscrit de faire part de ses préoccupations directement à l'autre inscrit (ou à l'autre personne) dont la conduite est considérée comme présentant un risque pour le public. Le dénonciateur peut également souhaiter demander un avis ou une assistance juridique. Comme nous l'aborderons plus en détail à la section 7.3 ci-dessous, une couverture d'assurance pour cette consultation juridique peut être offerte dans le cadre de la police d'assurance responsabilité professionnelle secondaire d'Ingénieurs Canada.
Dans les cas où un inscrit dénonce un autre inscrit, certains organismes de réglementation exigent que l’inscrit fasse d'abord part de ses préoccupations directement à l'autre inscrit.***** Certains organismes de réglementation exigent ou attendent également des inscrits qu'ils fassent part de leurs préoccupations à leur employeur ou à leur client directement, avant de le faire auprès de l’organisme de réglementation approprié. C'est ce que l'on appelle parfois le «devoir d'informer ». Comme décrit plus en détail dans les sous-sections 5.2.2 et 5.2.3, Ingénieurs Canada recommande que, dans les cas où un employeur ou un client a l'intention de rejeter une décision d'ingénierie et que cela pose un risque pour le public, l’inscrit devrait d'abord expliquer à l'employeur ou au client que la décision d’ingénierie en question est contraire à l'obligation de l’inscrit de protéger le public. S’il ne réussit pas à persuader l'employeur ou le client, l’inscrit devrait alors faire une dénonciation réglementaire à l'autorité compétente.
Lorsque la notification à la partie concernée n'est pas expressément requise, le dénonciateur devrait néanmoins s'interroger sur l'opportunité de le faire. Il importe de reconnaître que, dans certaines circonstances, une préoccupation peut être fondée sur une mauvaise compréhension des faits, auquel cas une discussion honnête avec la partie concernée pourrait amener à conclure que la dénonciation réglementaire n'est pas justifiée.
Toutefois, si le dénonciateur a des raisons de craindre des représailles de la part de la partie concernée ou craint pour sa sécurité physique, il peut être préférable de renoncer à avoir une discussion avec la partie concernée et de procéder directement à la dénonciation réglementaire.
Un inscrit peut craindre qu'une autre obligation légale qui lui incombe soit contradictoire avec la dénonciation réglementaire. Par exemple, l'inscrit peut être soumis à un accord de confidentialité ou peut avoir pris connaissance de l'information à l'origine de la préoccupation dans le cadre d'une procédure judiciaire. S’il n’est pas certain des conséquences que peuvent entraîner des obligations légales contradictoires, l’inscrit doit demander un avis juridique.
6.2 Qui fait une dénonciation réglementaire
Les dénonciations réglementaires (dans ce contexte) sont effectuées par des inscrits individuels ou des entreprises inscrites parce que ces deux catégories d’inscrits sont régies par les organismes de réglementation.†††††
6.3 À qui la dénonciation réglementaire est faite
La question de savoir à qui adresser une dénonciation réglementaire dépend 1) de la personne qui a eu une conduite présentant un risque pour le public, 2) des faits spécifiques et du ou des risques posés pour le public, et 3) de la législation en vigueur dans la zone de compétence où la conduite en cause a eu lieu.
Par exemple, un inscrit qui craint qu'un autre inscrit ait exercé la profession d'ingénieur d'une manière incompétente, dangereuse ou contraire à l'éthique peut être tenu ou encouragé à faire une dénonciation auprès de l'organisme de réglementation de l'inscrit en cause. Il existe souvent une différence entre une dénonciation réglementaire et une plainte. Toutefois, en fonction de la législation habilitante de l'organisme de réglementation, les dénonciations peuvent être traitées comme des plaintes, ou l'organisme de réglementation peut avoir un cadre législatif pour traiter les dénonciations séparément. Lorsqu'il existe un cadre législatif pour traiter les dénonciations séparément, il se peut que l'inscrit qui dénonce ne soit pas tenu d'agir en tant que plaignant ou de participer au processus de traitement de la plainte, et qu'il n'ait droit à aucune information sur l'enquête.
Une pratique exemplaire pour les organismes de réglementation consiste à s'assurer que les dénonciateurs disposent d'indications claires sur le service ou l'entité de l'organisme de réglementation qui est autorisé à recevoir les dénonciations. Souvent, les organismes de réglementation incluent ces informations dans une politique, un guide, une FAQ ou un document de conseils à la profession. L’organisme de réglementation qui ne dispose pas d'un processus législatif pour traiter les dénonciations en dehors du processus de traitement des plaintes peut avoir à traiter la situation dans laquelle un inscrit fournit des informations à l'organisme de réglementation, mais ne souhaite pas participer au processus de traitement de la plainte.
En fonction des faits particuliers et du ou des risques spécifiques pour le public, une dénonciation simultanée à un autre organisme ou autorité de réglementation peut également s'avérer appropriée. Par exemple, en cas de risque pour l'environnement, il peut être opportun de faire simultanément une dénonciation au ministère fédéral ou provincial de l'Environnement. Si l'on craint que l’inscrit ait commis une fraude, il peut être opportun de faire simultanément une dénonciation aux autorités policières locales.
Lorsque la conduite présentant un risque pour le public est le fait d'une personne non inscrite, l'organisme de réglementation n'a pas compétence pour traiter la dénonciation et gérer le risque potentiel pour le public, à moins que la conduite n'implique l'exercice du génie sans permis. Dans ces circonstances, une dénonciation doit être adressée à l'autorité ayant compétence pour atténuer le risque pour le public. Les inscrits devraient généralement connaître les organismes de réglementation qui sont pertinents dans leur domaine d’exercice particulier. S’il n'est pas sûr de l'autorité ou de l'organisme de réglementation auprès duquel dénoncer une conduite préoccupante, le dénonciateur doit demander des conseils juridiques.
Il est important que les inscrits qui envisagent de faire part de leurs préoccupations aux médias ou de les exprimer sur les médias sociaux ou d'autres forums en ligne sachent que cela ne les dispensera pas de leur obligation de faire une dénonciation réglementaire lorsqu’elle s’avère requise. Les organismes de réglementation peuvent avoir des exigences ou des politiques générales en ce qui concerne les déclarations faites au public, la publicité ou l'utilisation des médias sociaux. Le cas échéant, il convient de les prendre en compte pour s'assurer que le contenu des déclarations aux médias ou en ligne est approprié et conforme aux obligations professionnelles de l'inscrit.‡‡‡‡‡ Par ailleurs, un message publié sur les médias sociaux peut faire l'objet d'une plainte pour diffamation. Contrairement aux protections dont bénéficient les personnes qui déposent une plainte auprès d'un organisme de réglementation ou font une dénonciation réglementaire, la publication sur ses médias sociaux est dépourvue de protections semblables.
6.4 Renseignements qui devraient être inclus dans la dénonciation réglementaire
Souvent, la législation ou les politiques précisent ce qui doit figurer dans une dénonciation réglementaire. Les dénonciations réglementaires doivent généralement comprendre :
- Un résumé clair, chronologique et concis des faits à l'origine des préoccupations du dénonciateur quant à l'existence d'un risque pour le public;
- Lorsqu'une dénonciation a été faite simultanément à un autre organisme de réglementation ayant compétence pour traiter le risque, les détails de cette dénonciation simultanée;
- Le nom et les coordonnées d'autres personnes en mesure de fournir des informations pertinentes concernant les préoccupations exprimées dans la dénonciation réglementaire;
- Des copies de toutes les preuves documentaires corroborant l'allégation.
Les organismes de réglementation devraient indiquer clairement quelles informations doivent être incluses dans les dénonciations et ne pas chercher à recueillir plus d'informations qu'il n'est nécessaire.
6.5 Moment de la dénonciation réglementaire
Les dénonciations réglementaires seront plus efficaces si elles sont soumises rapidement. Les organismes de réglementation et les autres autorités de réglementation sont ainsi les mieux placés pour atténuer les risques potentiels pour le public. Les délais pour les dénonciations réglementaires prévues par la loi varient entre le moment où un événement se produit (c'est-à-dire immédiatement) et 30 jours. Pour les dénonciations réglementaires qui ne sont pas expressément prévues par la législation, le principe « le plus tôt sera le mieux » devrait être appliqué, car un retard dans la dénonciation peut entraîner, entre autres, des difficultés dans les enquêtes.
6.6 Résultats possibles de la dénonciation réglementaire
Une fois qu'une dénonciation a été faite à l'organisme de réglementation, il incombe à ce dernier de déterminer les mesures à prendre. Ces mesures comprendront probablement une enquête sur la conduite de l'inscrit soupçonné d'exercer de manière incompétente, dangereuse ou contraire à l’éthique. Les résultats de cette enquête détermineront si d'autres mesures sont nécessaires et lesquelles. Le type de mesure dépendra de la nature de la conduite en cause. Voici quelques exemples de résultats possibles (qui ne sont pas exhaustifs) :
- Si l'organisme de réglementation a des motifs raisonnables de croire que l'inscrit est coupable d'une faute professionnelle, les prochaines étapes peuvent inclure une procédure disciplinaire;
- Si l'organisme de réglementation craint que l'inscrit soit frappé d'incapacité, les prochaines étapes peuvent consister à soumettre l'inscrit à un examen médical indépendant;
- Si l'organisme de réglementation croit qu'une personne ou une entité a exercé la profession sans permis, les prochaines étapes peuvent inclure une mesure coercitive.
- S’il est convaincu que la conduite présumée ne présente pas de risque pour l'intérêt public ou qu'il estime que la conduite ne relève pas de sa compétence, l’organisme de réglementation ne prend aucune autre mesure. Dans le cas d'une conduite qui ne relève pas de sa compétence, l'organisme peut renvoyer l'affaire aux autorités ayant compétence sur la conduite en question.
Selon l'issue de l’enquête sur une dénonciation réglementaire, le dénonciateur pourrait ne pas avoir le droit de recevoir d'autres informations.
Les organismes de réglementation peuvent envisager d'établir des diagrammes de processus pour illustrer ce qui peut se passer à la suite d’une dénonciation réglementaire. Ils devraient également envisager d'ajouter une notification indiquant que le dénonciateur ne sera pas nécessairement avisé de l'issue de sa dénonciation. Le rôle potentiel du dénonciateur dans les dénonciations réglementaires devrait également être pris en compte (et est abordé plus en détail ci-dessous).
Lorsqu’une dénonciation est faite à un organisme de contrôle autre qu’un organisme de réglementation (par ex. un organisme chargé de l'application de la loi, un tribunal des droits de la personne, un organisme de réglementation en matière de respect de l'environnement, etc.), les résultats dépendront de la zone de compétence et des pouvoirs de l'organisme de contrôle en question et de la législation applicable.
7 Conséquences et défis de la dénonciation
7.1 Omission de faire une dénonciation réglementaire
La dénonciation réglementaire est un devoir professionnel et éthique qu’ont tous les inscrits. Les inscrits peuvent hésiter à faire une dénonciation réglementaire pour un certain nombre de raisons, notamment à cause du sentiment de camaraderie ou de loyauté envers leurs collègues professionnels, qui se traduit par une réticence à « dénoncer l'un des nôtres ».
Toutefois, le fait de ne pas faire une dénonciation réglementaire lorsqu'il est justifié de le faire constitue une violation du code de déontologie et possiblement de la législation, selon la zone de compétence où l’inscrit exerce sa profession. Il est possible que l’omission de dénonciation réglementaire lorsque cette dénonciation est justifiée constitue une faute professionnelle, ce qui pourrait avoir des conséquences disciplinaires pour l’inscrit. Les conséquences disciplinaires ou les sanctions législatives ne seront généralement appropriées que si les professionnels s’abstiennent de faire une dénonciation obligatoire, puisqu’ils sont libres de décider s'ils doivent faire une dénonciation facultative ou pas. Il est également possible que des membres du public lésés par la conduite en question intentent une poursuite contre l'inscrit pour avoir omis de dénoncer ladite conduite.
Les inscrits doivent s'assurer qu'ils comprennent bien la législation, la réglementation, le règlement administratif et les politiques de leur organisme de réglementation en matière de dénonciations réglementaires. Pour les aider à faire des dénonciations réglementaires comme il se doit, les organismes de réglementation s’efforceront de fournir aux inscrits des politiques et des orientations claires définissant les attentes concernant les types de conduite qui doivent être dénoncés (c'est-à-dire les dénonciations obligatoires) et les types de conduite qui peuvent être dénoncés (c'est-à-dire les dénonciations facultatives).
7.2 Dénonciation réglementaire inappropriée
Les dénonciations réglementaires devraient être faites de bonne foi. Le processus réglementaire ne doit pas être instrumentalisé ni utilisé pour nuire aux inscrits ou à d’autres personnes avec lesquelles le dénonciateur a des désaccords ou des problèmes personnels ou professionnels (p. ex. des concurrents, d’anciens employeurs, d’anciens conjoints, des adversaires politiques, etc.). Le processus réglementaire n'est pas non plus le cadre approprié pour aborder les désaccords idéologiques avec le type de travail d'un inscrit (p. ex. le raffinage du pétrole, la fracturation hydraulique, l'énergie nucléaire, etc.) ni être utilisé comme moyen d'activisme politique.
Lorsqu'une dénonciation réglementaire est déposée et que l'enquête qui s'ensuit révèle le caractère totalement infondé de la dénonciation et que l'ensemble des faits suggère que la dénonciation a été faite à des fins inavouées et inappropriées, il peut y avoir des conséquences professionnelles ou personnelles pour le dénonciateur. Les inscrits ont le devoir d'agir avec honneur et intégrité et faire une fausse dénonciation n'est pas conforme à ce devoir. Toute fausse dénonciation peut entraîner des conséquences disciplinaires pour le dénonciateur, car il s’agit d’un comportement susceptible d'être considéré par la profession comme honteux, déshonorant ou non professionnel, ces conséquences disciplinaires pouvant aller jusqu'à la perte du droit d’exercice.
En outre, les inscrits qui font une fausse dénonciation pourraient faire l'objet de poursuites de la part des personnes ou entités dénoncées. Comme indiqué ci-dessus, les dispositions en matière de dénonciation peuvent protéger les dénonciateurs contre les mesures de représailles, y compris les poursuites judiciaires. Toutefois, ces dispositions ne s'appliquent généralement qu'aux dénonciations faites de bonne foi. Pour déterminer si une dénonciation a été faite de bonne foi, il convient d'examiner l'ensemble des faits et des circonstances. Lorsque les circonstances démontrent que les allégations formulées dans la dénonciation sont sans fondement et suggèrent que le dénonciateur avait un motif secret pour agir de la sorte, par ex. une vendetta personnelle contre l’inscrit dénoncé, l'organisme de réglementation est susceptible de conclure que la dénonciation n'a pas été faite de bonne foi.
Cet avertissement ne doit pas dissuader les futurs dénonciateurs qui pensent raisonnablement qu'un inscrit ou une autre personne a eu une conduite qui présente un risque pour le public. Comme indiqué dans la sous-section 5.1.3, la norme de la décision raisonnable n'exige pas une certitude absolue quant à l'existence d'un risque pour le public. Si un tiers objectif, considérant les faits et circonstances connus, estime qu'il pourrait y avoir un risque pour le public, il convient alors de faire une dénonciation réglementaire.
7.3 Protection des dénonciateurs
Les dénonciateurs peuvent craindre des représailles, en particulier lorsque la personne ou l'entité faisant l'objet de la dénonciation est en position de force par rapport au dénonciateur, par exemple un employeur.
Le dénonciateur confronté à des représailles à la suite d'une dénonciation réglementaire doit signaler ces représailles à l'organisme de réglementation auprès duquel la dénonciation initiale a été déposée.
L’inscrit qui exerce des représailles pourrait faire face à des conséquences réglementaires. Les inscrits ont le devoir éthique d'agir avec honneur et intégrité et le fait d'user de représailles va à l'encontre de ce devoir et peut être considéré comme une faute professionnelle, car il s'agit d'un comportement généralement jugé honteux, déshonorant ou non professionnel.
En fonction des faits spécifiques et de la zone de compétence dans laquelle les représailles ont été exercées, l'acte de représailles pourrait constituer une violation de la législation applicable au génie et avoir d'autres conséquences.§§§§§ Également, dans certaines circonstances, d'autres législations peuvent également prévoir la protection des dénonciateurs contre les actes de représailles. Par exemple, certaines lois provinciales sur l'emploi prévoient des protections pour les employés qui dénoncent des conduites dangereuses ou illégales.
Ces protections garantissent généralement que si la dénonciation est faite de bonne foi, aucune poursuite ou autre procédure ne sera intentée contre la personne qui l’a faite. Les mesures de représailles exercées contre un dénonciateur de bonne foi seraient considérées comme une violation de ces protections. De telles mesures pourraient entraîner des amendes et d'autres répercussions possibles pour la partie en cause dans le comportement de représailles. Ces types de protections législatives seraient considérés comme de bonnes pratiques pour protéger les dénonciateurs.
Bien que les protections législatives des dénonciateurs constituent la meilleure forme de protection et de soutien des dénonciateurs potentiels, l'assurance protection des dénonciateurs peut être utile pour fournir un soutien économique. Cette assurance ne peut pas empêcher les représailles de se produire, mais elle peut fournir un soutien financier pour aider le dénonciateur à en gérer les conséquences. Par exemple, dans le cadre de son assurance responsabilité professionnelle secondaire, Ingénieurs Canada offre une assurance protection des dénonciateurs, qui couvre les coûts économiques associés aux dénonciations, notamment les frais juridiques, la perte d'emploi et les dépenses liées à la recherche d'un nouvel emploi.******
7.4 Participation au processus de plainte ou de discipline
Il peut être demandé à l'inscrit dénonciateur de participer davantage au processus d'enquête ou d'agir en qualité de témoin lorsque l'organisme de réglementation détermine qu'une procédure disciplinaire est appropriée. Bien que l'organisme de réglementation prenne en considération les demandes des inscrits de rester anonymes, et puisse honorer ces demandes dans la mesure du possible, il ne sera pas toujours possible pour lui de garantir l'anonymat.
Si l’inscrit dénoncé fait l'objet d'une procédure disciplinaire en raison des conséquences potentiellement graves auxquelles il fait face, il a droit, en vertu de la loi, à une audience complète et équitable. Cela comprendra généralement la divulgation complète des informations sur lesquelles s'appuie l'organisme de réglementation, afin que l’inscrit puisse comprendre les allégations portées contre lui et y répondre pleinement.
De la même façon, une personne ou une entité poursuivie pour avoir exercé le génie sans permis aura droit à ce que les informations et documents pertinents lui soient largement divulgués en vertu des règles du tribunal de la zone de compétence où se déroule la procédure exécutoire.
Dans certaines situations, il est peu probable que le dénonciateur soit invité à participer davantage au processus ou qu'il reçoive des informations supplémentaires sur l'affaire dénoncée. Par exemple, dans les cas concernant l'aptitude à l’exercice, lorsque des renseignements personnels sur la santé du professionnel sont en jeu, le dénonciateur pourrait ne pas être appelé à témoigner. Il est également peu probable que le dénonciateur ait l'occasion d'assister à l'audience concernant l'aptitude à l’exercice, car ces audiences se déroulent généralement à huis clos afin de protéger la vie privée de l'inscrit qui fait l'objet de la dénonciation. En outre, seule l'issue de l'audience est généralement connue du public, et ce, uniquement si elle entraîne la radiation du professionnel ou des restrictions quant à sa capacité à exercer. Les détails spécifiques de la situation ne sont généralement pas divulgués au public.
8 Conclusion
Les dénonciations réglementaires constituent une obligation professionnelle et éthique importante à laquelle les inscrits doivent se conformer afin de contribuer à la protection de l'intérêt public. Bien que le présent guide fournisse des orientations générales et des pratiques exemplaires, les inscrits devraient toujours envisager ces pratiques exemplaires en parallèle avec les exigences particulières de la ou des zones de compétence dans lesquelles ils sont autorisés à exercer le génie.
Les organismes de réglementation reconnaissent le rôle essentiel des inscrits en ce qui a trait aux dénonciations réglementaires, rôle qui appuie le mandat des organismes de réglementation de protéger le public. Ils devraient poursuivre leurs efforts pour rendre le processus de dénonciation clair, simple et favorable aux inscrits.
Annexe A - Glossaire
Bonne moralité : la plupart des professions exigent que le professionnel soit de bonne moralité pour exercer, celle-ci étant définie comme suit : « 1. Ensemble des qualités ou des caractéristiques, notamment mentales et morales, d’une personne qui agit conformément aux principes, à l’idéal de la conduite. 2. Force morale. 3. Bonne réputation ». La bonne moralité renvoie à des notions de force morale et éthique et comprend des caractéristiques comme l’intégrité, la franchise, l’honnêteté et la loyauté.
Dénonciation obligatoire : signifie qu'une personne est tenue par la loi de faire une dénonciation. Cette obligation légale dicte souvent les circonstances dans lesquelles une dénonciation doit être faite, le délai dans lequel cette dénonciation doit être faite et la nature de la dénonciation. En règle générale, le fait de ne pas respecter le devoir obligatoire de dénoncer entraîne également des conséquences juridiques (amendes, accusations ou procédures pour inconduite).
Par exemple, les inscrits de la Colombie-Britannique sont tenus par la loi de dénoncer d'autres inscrits identifiés s'il existe des motifs raisonnables ou probables de croire que ceux-ci exercent la profession d'ingénieur d'une manière susceptible de présenter un risque de préjudice important pour la santé ou la sécurité du public ou d'un groupe de personnes, ou pour l'environnement.
Turpitude morale : est généralement définie comme une conduite jugée contraire aux normes collectives en matière de justice, d’honnêteté et de bonnes mœurs.
Dénonciation facultative : signifie qu’il n’y a pas d’exigence légale pour une personne de dénoncer. Toutefois, la personne est autorisée (et/ou encouragée) à faire une dénonciation si elle estime qu’il est raisonnable de le faire. Les dénonciations facultatives peuvent toujours faire l’objet d’une législation, mais la formulation utilisée sera généralement « peut » au lieu de « doit ».
Par exemple, les inscrits de l'Ontario sont autorisés à dénoncer la faute professionnelle ou l'incompétence d'autres inscrits, sans y être tenus.
Inscrit : s’entend d’une personne inscrite auprès d’un organisme de réglementation du génie et peut inclure, notamment, les ingénieurs, les ingénieurs stagiaires, les membres stagiaires, les candidats à la profession d’ingénieur et les titulaires de permis.
Organismes de réglementation : les organismes provinciaux et territoriaux chargés de réglementer la profession d’ingénieur au Canada.
Dénonciations réglementaires : dénonciations obligatoires et dénonciations facultatives (voir ci-dessus pour les définitions des dénonciations obligatoires et facultatives).
Notes
* « Inscrit » s’entend d’une personne inscrite auprès d’un organisme de réglementation du génie et peut inclure, notamment, les ingénieurs, les ingénieurs stagiaires, les membres stagiaires, les stagiaires en génie et les titulaires de permis.
†En Colombie-Britannique, par exemple, les employeurs d’inscrits sont soumis à une telle exigence.
‡ Le code de déontologie de l’Association of Engineers and Geoscientists of Alberta n'aborde pas explicitement les dénonciations réglementaires, mais interprète un devoir de dénoncer découlant d'obligations expresses énoncées dans son code de déontologie, https://www.apega.ca/docs/default-source/pdfs/standards-guidelines/code-of-ethics-5-rules-of-conduct-reference-guide-march-2023.pdf?sfvrsn=ef0d8c00_3
§ Ces obligations existent actuellement pour les inscrits de l’Association of Engineers and Geoscientists of Manitoba, de l’Ordre des Ingénieurs du Québec et de la Northwest Territories and Nunavut Association of Professional Engineers.
** Par exemple, le Nouveau-Brunswick exige actuellement la divulgation de toute procédure de cette nature dans le cadre de la demande de renouvellement annuel des inscrits.
†† Professional Governance Act, [SBC 2018] CHAPTER 47
‡‡ https://engineerscanada.ca/fr/guide-public-sur-la-gestion-du-risque
§§ https://engineerscanada.ca/fr/guide-public-sur-la-gestion-du-risque#-contexte
*** Voir p. ex. Green c. Société du Barreau du Manitoba, 2017 CSC 20 (CanLII), [2017] 1 RCS 360, <https://www.canlii.org/fr/ca/csc/doc/2017/2017csc20/2017csc20.html >, par. 79.
††† Button c. Min. Main-d’œuvre et Imm., 1975 CanLII 2246 (CAF), [1975] 1 CF 277, <https://www.canlii.org/fr/ca/caf/doc/1975/1975canlii2246/1975canlii2246.html >
‡‡‡ La plupart des professions exigent que le professionnel soit de bonne moralité pour exercer, celle-ci étant définie comme suit : « 1. Caractère moral, valeur au point de vue moral, éthique. 2. Attitude, conduite ou valeur morale. 3. Réputation ». La bonne moralité renvoie à des notions de force morale et éthique et comprend des caractéristiques comme l’intégrité, la franchise, l’honnêteté et la loyauté.
§§§ Ces obligations existent actuellement pour les inscrits de l’Association of Engineers and Geoscientists of Manitoba, de l’Ordre des Ingénieurs du Québec et de la Northwest Territories and Nunavut Association of Professional Engineers.
**** Les inscrits doivent toujours tenir compte des exigences juridiques lorsqu'ils font une dénonciation et peuvent souhaiter obtenir un avis juridique sur la nécessité de la dénonciation et/ou sur la manière de la faire.
†††† Voir p. ex. Green c. Société du Barreau du Manitoba, 2017 CSC 20 (CanLII), [2017] 1 RCS 360, <https://www.canlii.org/fr/ca/csc/doc/2017/2017csc20/2017csc20.html >, par. 79.
‡‡‡‡ Lorsqu'il n'y a pas d'orientation juridique concernant les dénonciations réglementaires ni d’obligation en la matière, les considérations doivent être similaires.
§§§§ Lorsqu'il n'y a pas d'orientation juridique concernant les dénonciations réglementaires ni d’obligation en la matière, les considérations doivent être similaires.
***** C'est ce qu'on attend actuellement des inscrits de l'Alberta et de l'Île-du-Prince-Édouard.
††††† Les membres du public peuvent faire des dénonciations auprès des organismes de réglementation, mais il est rare qu'ils aient le « devoir » de le faire (à l'exception des employeurs ou des entités employeuses ou affiliées qui peuvent avoir le devoir législatif de dénoncer la conduite d'un employé inscrit).
‡‡‡‡‡ Par exemple, en vertu du Code de déontologie de Professional Engineers of Ontario, l’inscrit est tenu de « s’efforcer en tout temps d’accroître l’appréciation par le public de sa profession en la lui faisant connaître davantage et en manifestant sa désapprobation à l’endroit de déclarations fausses, injustes ou exagérées à son sujet. »
§§§§§ En Colombie-Britannique, les mesures de représailles à l'encontre d'un dénonciateur (qui peut être un inscrit ou l'employeur d'un inscrit) constituent une infraction à la législation qui est passible d'une amende pouvant aller jusqu’à 200 000 dollars pour les inscrits individuels et jusqu’à 500 000 dollars pour les entreprises inscrites.
******https://engineerscanada.ca/fr/services-aux-ingenieurs/assurance-et-avantages/assurance-responsabilite-professionnelle-secondaire/denonciation