Rob Langlois est spécialisé dans les systèmes essentiels à la sécurité et s’est joint sa communauté pour accroître la sécurité du transport des nouveau-nés fragiles.
La plupart d’entre nous sont habitués aux chocs, aux secousses et aux bruits forts lors des déplacements dans les rues urbaines et sur les autoroutes. Ou au rugissement vibrant d’un avion au décollage et à l’atterrissage. Mais chez un nouveau-né de moins d’un mois en situation de crise médicale, ces mouvements et ces bruits peuvent faire beaucoup de dégâts. Comment améliorer la sécurité de ces patients vulnérables aux forces de base du transport que la plupart des gens considèrent normales? C’est le problème qu’une équipe d’experts – qui compte des ingénieurs, des médecins, des infirmières, des fabricants et des opérateurs d’équipements – tente de résoudre. Robert Langlois, ingénieur en mécanique, et professeur et doyen associé à la Faculté de génie et de conception de l’Université Carleton, fait partie de cette équipe qui travaille sur la dynamique des transports essentielle à la sécurité des patients néonatals – des bébés âgés de moins de quatre semaines et souvent atteints de maladies graves.
En cas d’urgence médicale, les nourrissons dépendent d’un transport médical rapide pour les emmener dans des unités spécialisées qui peuvent leur fournir le niveau de soins avancé dont ils ont besoin. Si la rapidité est essentielle, les bruits et les vibrations du transport peuvent avoir des conséquences désastreuses, car les nourrissons y sont particulièrement sensibles, ce qui n’est pas le cas de la plupart des patients. Le problème est complexe et comporte de nombreux éléments mobiles. L’un de ces éléments est la dynamique des transports, un domaine dans lequel M. Langlois a beaucoup d’expérience.
Les systèmes essentiels à la sécurité
Rob Langlois a toujours été passionné par le génie. Enfant, il passait des heures à démonter des objets pour en comprendre le fonctionnement. En grandissant, il a été attiré par la dynamique, « la relation entre les forces et le mouvement ».
Son application pratique de la dynamique combinait plusieurs éléments du transport. « Mon premier emploi consistait à faire atterrir, à arrimer et à manœuvrer en toute sécurité des hélicoptères sur les ponts de navires, ce qui était un emploi de rêve pour quelqu’un qui s’intéresse à la dynamique appliquée et à la simulation informatique. Ce travail impliquait notamment des aspects de la dynamique des sols, des véhicules et des aéronefs, de l’analyse des mouvements des navires et de la conception aérospatiale », explique M. Langlois.
Il a apprécié la complexité du défi, qui comportait de multiples éléments mobiles, dont la modélisation dynamique, le développement de simulations informatiques et l’étude et la compréhension des exigences en matière d’arrimage, de sécurité et de conception, et le traitement des questions pratiques sur le terrain.
« J’ai fini par me retrouver dans cette sorte de créneau des systèmes dynamiques essentiels à la sécurité. Le projet de transport de patients néonatals s’inscrit donc parfaitement dans ce cadre », précise M. Langlois. Les patients néonatals peuvent avoir besoin d’être transportés par ambulance terrestre, par avion et hélicoptère de transport médical, ou par une combinaison de ces moyens. Pour réduire les bruits et les vibrations, il faut arrimer de multiples composants dans différents véhicules de transport, tout en garantissant la sécurité du patient et des membres de l’équipe de transport médical.
Rassembler l’équipe
« Je dois reconnaître la contribution de James Green », dit M. Langlois, soulignant que M. Green, son collègue qui est également professeur d’ingénierie à l’Université Carleton, l’a invité à se joindre au projet, qui était au début une petite étude sur les vibrations dans les transports interhospitaliers. Le projet a toutefois pris beaucoup d’ampleur depuis sa création.
Le projet de transport néonatal implique une grande variété de personnes et d’organisations, dont les équipes de génie clinique et de transport des nouveau-nés du Centre hospitalier pour enfants de l’est de l’Ontario (CHEO), le Centre de recherche sur l’automobile et les transports de surface et le Laboratoire de recherche en vol du Conseil national de recherches du Canada, le Service paramédic d’Ottawa, le service d’ambulance aérienne de l’Ontario (Ornge), des fabricants d’équipements de transport médical (International Biomedical et Stryker), le Comité de la santé maternelle de l’Ontario et une équipe de chercheurs de deux départements de génie de l’Université Carleton, dont de nombreux étudiants de premier cycle et de cycles supérieurs.
« C’est souvent ce qui arrive dans le domaine du génie, explique M. Langlois. Vous savez que vous avez besoin de la participation de différentes personnes ayant des compétences différentes. Chacun apporte ses compétences et ses ressources particulières pour résoudre le problème. »
Le travail d’équipe de différents groupes a été essentiel pour étudier correctement la nature interdisciplinaire du problème. « La meilleure façon de résoudre un problème est de consacrer du temps pour le comprendre le mieux possible », indique M. Langlois.
L’ampleur du projet se prête toutefois à certains types de défis particuliers. D’un point de vue logistique, la coordination et la collecte de données provenant de différentes sources ont constitué un défi en soi. L’utilisation des équipements a également dû être coordonnée, et les interdépendances au sein du projet signifient qu’un retard dans une partie du projet se répercute inévitablement sur les autres.
Malgré les difficultés, M. Langlois se félicite de la collaboration et de l’enthousiasme de toutes les parties concernées. « L’une des particularités de ce projet est qu’il vise vraiment à servir l’intérêt public... Tous les intervenants veulent aider parce qu’ils partagent l’objectif final du projet. Tout le monde est motivé par le problème, tout le monde veut aider à protéger ces bébés vulnérables. »
Comprendre le problème
Dans le cadre de cette vaste collaboration interdépendante, sur quoi Rob Langlois travaille-t-il en particulier? La contribution de son équipe à ce projet repose sur trois piliers d’investigation : la caractérisation de l’environnement sonore et vibratoire, la mise au point de tests de laboratoire capables de recréer les conditions observées sur le terrain et l’élaboration de solutions ou de mesures d’atténuation des problèmes découverts.
Pour le pilier expérimental, le problème a également dû être examiné à trois échelles, de la plus petite à la plus grande, soit l’incubateur de transport (isolette ou chambre à environnement contrôlé dans laquelle le bébé est transporté), la combinaison des équipements de transport et des équipements médicaux qui se trouve sur la civière avec l’isolette, et enfin le véhicule entier (ambulance ou hélicoptère) avec tous les éléments combinés.
« En cours de route, nous avons appris des choses très intéressantes », dit M. Langlois. Le projet n’est pas terminé, mais M. Langlois et ses collègues ont déjà recommandé six mesures d’atténuation potentielles à l’intention des unités de transport néonatal. Certaines de ces mesures consistent à modifier des éléments du système existant, par exemple en améliorant la suspension des véhicules ou en changeant les matelas utilisés dans l’isolette. D’autres suggestions nécessitent une intervention technique spécifique, comme la réduction de la flexibilité des composants de l’unité de transport afin que le poids de l’équipement, environ 200 kilogrammes, soit transféré plus efficacement à la structure du véhicule, et l’essai et la mise en œuvre de mesures d’isolation des vibrations pour éviter que celles-ci n’atteignent le bébé. Il faut également tenir compte de l’état des routes, en examinant la planification des itinéraires afin que le conducteur puisse emprunter les routes les plus rapides et les moins cahoteuses, ainsi que de la rétroaction en temps réel de l’opérateur, qui permet au conducteur de savoir quelles sont les conditions pour le patient à l’arrière du véhicule.
Le projet n’est pas encore achevé, mais l’équipe en apprend toujours plus et est impatiente de voir ce qu’elle pourra découvrir d’autre dans sa quête d’un transport néonatal plus sécuritaire et plus silencieux.
Collaborer pour le bien public
Rob Langlois, qui a travaillé à la fois dans l’industrie et dans le milieu universitaire, ne tarit pas d’éloges sur ces deux environnements. « Tous les ingénieurs développent une approche commune des problèmes, un vocabulaire commun et une compréhension commune des processus et des priorités », dit M. Langlois. Quel que soit le milieu de travail, la collaboration accrue entre des ingénieurs de différentes disciplines ou de différentes régions crée la possibilité de travailler sur des projets plus vastes et plus complexes.
Un autre changement inspirant est l’importance accrue accordée, dans la formation en génie, aux compétences professionnelles et au rôle important des ingénieurs dans la société. « Les ingénieurs sont formés d’une manière qui leur permet de s’impliquer davantage dans l’ensemble de la progression d’un projet et dans la défense de valeurs sociales, indique M. Langlois. La conscience sociale à laquelle les ingénieurs sont formés jouera un rôle de plus en plus important dans l’industrie », prédit-il.
Rob Langlois est convaincu que, tout comme les ingénieurs, les autres professionnels avec lesquels il a travaillé s’attachent à servir le bien public. Il l’observe dans le projet de transport néonatal en cours : la collaboration interdisciplinaire aura pour résultat net d’améliorer la sécurité de certains des membres les plus vulnérables de notre communauté. « En ce qui concerne l’ingénierie, dit M. Langlois, l’objectif final est d’améliorer un processus, un système ou un objet, n’est-ce pas? Quelque chose qui améliore la vie des gens. L’ingénierie contribue vraiment à la construction d’un avenir meilleur. »