Cet été, les organismes de réglementation ont participé à une séance de formation en ligne donnée par Cathi Mietkiewicz, une avocate spécialiste des associations et des affaires réglementaires. Elle a présenté trois cas récents et leur incidence sur la réglementation.

Dans son exposé sur l’affaire Hanson v. College of Physicians and Surgeons of Ontario (CPSO), 2021 ONSC 513 (CanLII), maître Mietkiewicz a comparé la notion existante de membre « ingouvernable » à celle de membre « incorrigible ». La distinction a suscité énormément d’intérêt chez les participants.

Il arrive que les organismes de réglementation aient à faire face à des praticiens « ingouvernables », c'est-à-dire des personnes ayant de longs antécédents de comportements non conformes. Cela se produit lorsqu'un organisme de réglementation, qui a suivi le processus disciplinaire et qui est prêt à sanctionner le praticien, juge que la personne n'est pas disposée à être « gouvernée » par son ordre professionnel et qu'aucune pénalité habituelle n'est susceptible de l’amener à se conformer ou à s’amender. L’affaire Hanson c. l’Ordre des médecins et chirurgiens de l'Ontario a donc fait ressortir un nouveau terme qui va au-delà d’ingouvernable, à savoir : incorrigible.

Un panel du Comité de discipline de l’Ordre des médecins et chirurgiens de l'Ontario a jugé que le docteur Hanson avait commis trois actes d’inconduite professionnelle :

  • Avoir été reconnu coupable d'une infraction pour avoir facturé des services non étayés par des pièces justificatives;
  • Ne pas avoir respecté les normes d'exercice en ce qui concerne l'évaluation et le traitement des patients ainsi que la tenue des dossiers, et avoir fait preuve d'un manque de connaissances et de jugement;
  • Avoir permis qu'un vaccin soit administré par un membre de son personnel et s’être ensuite livré à une longue dissimulation pour tromper son ordre professionnel, notamment en préparant un faux dossier et en incitant son employée à en assumer la responsabilité.

Fait à souligner, M. Hanson avait de graves antécédents de comportements préoccupants pour la sécurité du public. Au fil des ans, son permis d'exercice avait été suspendu, il avait fait l’objet d’une surveillance étroite et avait dû suivre des cours pour améliorer sa pratique. Après avoir eu de nombreuses occasions de s’amender, M. Hanson avait commis de nombreux manquements et n'avait jamais respecté les normes de pratique. Il a finalement été jugé incorrigible, plutôt qu'ingouvernable, et radié du tableau de son ordre.

Cathi Mietkiewicz souligne que, dans cette affaire, le tribunal a bien décrit les facteurs importants qui ont rendu l’inscrit « incorrigible » : « La décision du comité [de discipline] selon laquelle l'appelant est incorrigible était fondée sur son étude du lourd dossier disciplinaire de l'appelant, sur le fait qu'il avait déjà eu plusieurs occasions de réhabiliter, sans succès, et que ses améliorations n’étaient pas durables. Pour parvenir à cette conclusion, le comité a tenu compte à la fois de l'évaluation clinique de 2018-2019 et de la réévaluation subséquente. »

La protection du public est de la plus haute importance pour les organismes de réglementation. La radiation est la sanction la plus sévère qu'un ordre professionnel puisse imposer. Bien que les organismes de réglementation aient la responsabilité de révoquer les permis d’exercice lorsque cela est nécessaire, une partie de cette responsabilité consiste également à s'assurer que les membres de la profession se conforment aux normes. Le terme « incorrigible » s’applique à un membre qui ne semble pas s'améliorer malgré une ordonnance de démarche corrective. Cette situation peut être préjudiciable au mandat de protection du public d'un organisme de réglementation. Lors de l’examen des antécédents et des schémas de comportement, l'existence de ce nouveau terme peut donner aux organismes de réglementation un nouvel outil pour remplir leur mandat.

« Le Comité de discipline a noté que l’inscrit a manqué de discernement envers sa propre conduite, ce qui a contribué au fait qu'il ne l’a pas corrigée malgré les nombreuses occasions qui lui ont été données de le faire, a déclaré Mme Mietkiewicz. Dans ce cas, on pourrait certainement soutenir que l’inscrit était « ingouvernable » compte tenu de ses multiples inconduites, mais le terme « incorrigible »  semble être un descripteur plus exact, étant donné le nombre de chances qu'on lui a données de s’amender. »